Ego… métrique

De nos jours, le « Connais-toi toi-même » prend une tournure singulière. Cette sagesse antique n’a sans doute jamais été aussi populaire qu’aujourd’hui, même si c’est en empruntant des chemins que n’auraient pu imaginer nos ancêtres qui la gravèrent au fronton du temple de Delphes. Maintenant, mon
« Moi » est mesuré, jour et nuit, par la puissance des applications du Quantified Self (QS) : une véritable batterie de données sur le nombre de calories brûlées, le poids, la tension, le pouls, ou encore la qualité du sommeil. Apparus au stade industriel à la fin des années 2000, les objets connectés liés au bien-être et à la santé se sont multipliés, explorant toutes les pistes possibles. Les utilisateurs pionniers avaient ainsi accès à des données qui les aidaient à se fixer des objectifs simples, et découvraient émerveillés le nombre de pas qu’ils faisaient par jour. Et, en bon élève docile, ils acceptaient la petite remontrance ou le message de félicitation envoyés par le programme. Les capteurs et bracelets d’activité ont ainsi ouvert le marché avec Jawbone, iHealth, Nike VitaDock ou Fitbit, qui connurent un premier succès même s’ils ne proposaient que très peu de mesures. Suivirent une
plus grande diversité d’objets : bouchons de tube de médicament GlowCaps alertant l’utilisateur, ceintures Lumo Back vibrant pour signaler une mauvaise posture, ou serre-têtes Melon destinés à améliorer l’attention…
Les leaders des terminaux mobiles ont ensuite essayé de prendre le contrôle du marché en lançant tour à tour leurs montres connectées, et faire ainsi main basse sur un marché aux perspectives immenses, le dispositif central étant leurs smartphones – véritables pilotes des applications.

« Quantified Self : les objets connectés liés
au bien-être et à la santé se sont multipliés. »

La fin des Telcosaures ?

L’ère glaciaire des opérateurs télécoms n’est pas encore venue… Ces dinosaures, comme certains les appellent encore, sont toujours bien là. Ils ont même repris des forces
au moment où les besoins de l’économie numérique en bande passante n’ont jamais été aussi importants. Le désir de connectivité à très haut débit pour tous, à tout moment et en tout lieu, demande encore aujourd’hui des investissements gigantesques et continus que seuls sont capables de supporter des opérateurs puissants. A l’ombre de ces mastodontes qui se dévorent entre eux, notamment en Europe qui offre à leurs appétits une réserve de plus petits spécimens, se développent des opérateurs rapides et plus légers. L’histoire de ces lightoperators est jalonnée d’échecs et de succès. Ils occupent généralement des niches économiques particulières, celles des ruptures technologiques, du low cost et des faibles marges. Seuls quelques-uns, comme Free ou Vodafone ont su sortir du lot et grandir. Alors que la plupart apparaissent et disparaissent au grès des innovations techniques, des fusions-acquisitions et des nouvelles conditions de marché. C’est ainsi que les petits opérateurs d’aujourd’hui succèdent à une génération d’entreprises qui a été progressivement asphyxiée par la baisse tendancielle des prix (services voix, messagerie, haut débit) ou la progression des offres groupées, multi play et bundles en tout genre. Mais, loin des opérateurs historiques, de nouveaux entrants ont pris le relais en exploitant de nouveaux marchés viables. Ils apparaissent d’ailleurs dans un contexte déjà très dense, comme le montre le nombre des quelque 1.000 MVNO déjà recensés dans le monde en 2014. Le nombre élevé de ces opérateurs mobiles virtuels, louant leurs réseaux aux autres, prend en compte la prise de contrôle des plus importants d’entre eux par des groupes puissants. C’était le cas des MVNO dits complets (Full MVNO), comme Virgin Mobile en France ou Telenet aux Pays-Bas, maîtrisant l’essentiel des maillons clés, de la facturation aux fonctions de gestion de réseau – même si par définition ils n’étaient pas propriétaire de l’infrastructure radio.

« Ces light operators sont synonymes de low cost et de faibles marges, mais aussi de ruptures technologiques. »

Les Crypto-monnayeurs

Ce soir, j’ai rendez-vous avec un ami qui m’a promis de tout me dire sur son activité de « mineur », tout autant mystérieuse que nocturne. Quand il m’ouvre la porte, je suis presque déçu de ne pas le trouver le visage noirci,
moi qui vaguement l’imaginais travaillant à creuser une galerie au fond de sa cave, à la lueur d’une lampe frontale, en quête d’un trésor ancestral… Si nous descendons bien l’escalier, c’est pour découvrir un mini data center patiemment assemblé par mon ami qui s’est doté de la puissance nécessaire pour se livrer au « minage ».
Il fait ainsi partie des milliers de particuliers autour de la planète qui participent à la création d’unités de comptes des nouvelles monnaies virtuelles. Être partie prenante
du réseau peer-to-peer de ces crypto-monnaies est autant un passe-temps pour geek avancé qu’une perspective de revenus très concrète, même si cette activité est de plus en plus confisquée par des professionnels. Ainsi équipé, il est en effet possible de faire participer son ordinateur à la résolution des calculs nécessaires à la validation de chaque transaction, et de se voir attribuer un certain nombre d’unités de la monnaie virtuelle concernée. Chacun espère ainsi accumuler des « coins » qui firent la fortune de quelques pionniers.

« Il s’agit bien d’un phénomène majeur inscrit
désormais dans la longue histoire de la monnaie. »