Les ayants droits ont surestimé le nombre de pirates

En fait. Le 3 septembre, la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi) a publié un état chiffré de la réponse graduée, mois par mois, depuis son lancement il y a près de trois ans.
Mais combien de dossiers de récidivistes ont-ils été transmis à la justice ?

En clair. Lancée en octobre 2010, la réponse graduée mise en oeuvre par la Commission de protection des droits (CPD) – bras armé de l’Hadopi – est bien loin des 125.000 constats de piratages par jour qu’avaient prévu d’atteindre potentiellement les organisations de la musique et du cinéma sur les réseaux peer-to-peer.
La Cnil a en effet fixé en juin 2010 un plafond de 25.000 constats par jour pour chacune des cinq autorisations accordées à la SCPP, la SPPF, la Sacem et la SDRM pour la musique, ainsi qu’à l’Alpa pour le cinéma (1) (*) (**).

Seulement 1,6 % du potentiel envisagé en 2010
Or, en trente-cinq mois d’activité de la CPD, le nombre de « saisines » quotidiennes d’adresses IP de pirates présumés a été – au mieux – de 3.533 en moyenne par jour sur un mois, en l’occurrence en mai 2011.
Ce niveau d’infractions jamais atteint ni dépassé depuis. Il s’agit pourtant du cumul pour les cinq organisations. Au total, le bilan chiffré de l’Hadopi d’octobre 2010 à août 2013 affiche 2.084.847 de premiers e-mails d’avertissement envoyés. Edition Multimédi@
a ramené ce cumul aux trente-cinq mois de réponse graduée : cela représente une moyenne de 59.567 emails par mois – soit finalement moins de 2.000 e-mail par jour
en moyenne. C’est, selon nos calculs, seulement 1,6 % du potentiel des 125.000 constats quotidiens envisagés au départ par les ayants droits ! La SCPP, la SPPF, la Sacem,
la SDRM et l’Alpa ont-ils surestimé l’ampleur du piratage sur Internet, du moins sur les réseaux peer-to-peer sur lesquels l’Hadopi est habilité par la loi à intervenir (à défaut
de pouvoir agir sur le streaming et le direct download) ?
Puis, seuls 10 % des pirates présumés qui ont reçu un premier avertissement ont été destinataires d’un deuxième avertissement, cette fois par courrier avec accusé de réception au nombre de 210.603 au total sur trente-cinq mois. Parmi ces récalcitrants, seul 0,3 % – soit 710 récidivistes – ont fait l’objet de délibérations de la part de la CPD. Edition Multimédi@ a demandé, en vain, à l’Hadopi de lui indiquer le nombre de dossiers de récidiviste transmis en fin de compte à la justice. Tout au plus sait-on qu’à la date du 1er octobre 2012, 18 dossiers de récidivistes avaient été transmis aux parquets et qu’à
ce jour seules quatre jugements ont été prononcés. Un seul a été condamné à une suspension de son accès à Internet durant quinze jours, peine qui ne sera pas appliquée a révélé PC INpact… @