Le triumvirat Google-Facebook-Amazon domine encore plus le marché de l’e-pub, à la peine en 2020

Google, Facebook et Amazon constituent plus que jamais un triumvirat sur le marché français de la publicité en ligne, malgré une baisse sans précédent (- 8 %) des recettes publicitaires au cours du premier semestre. La « longue traîne » des petits annonceurs profite aux grands acteurs du Net.

« La crise sanitaire a impacté très négativement le marché de la publicité digitale qui recule de 8 % sur ce semestre, à 2,5 milliards d’euros, par rapport à la même période en 2019. Cette baisse est considérable sur un marché qui, de manière traditionnelle, croit fortement de 10 % à 13 % par an. Le “search” [pub sur les moteurs de recherche] et le “social” [pub sur les réseaux sociaux] ont mieux résisté, portés par des acteurs comme Google, Facebook et Amazon », a expliqué Emmanuel Amiot, associé communication, média et technologie au sein du cabinet Oliver Wyman.

Google-Facebook-Amazon : 80 % de l’e-pub
Le 24e Observatoire de l’e-pub, qu’il a réalisé pour le compte du Syndicat des régies Internet (SRI) et de l’Union des entreprises de conseil et achat média (Udecam), montre que Google/YouTube, Facebook/Instagram et Amazon tirent leurs épingles du jeu malgré la crise sanitaire. Résultat, « l’écart se creuse encore davantage entre le trio formé par Google, Facebook et Amazon par rapport au reste du marché ». Ces trois géants du Net, qui font plus que jamais figures de triumvirat dominant en s’arrogeant environ 80 % du marché français de la publicité en ligne (1), ont notamment bénéficié de « leur exposition à la longue traîne (long tail) des petits annonceurs ». Ces derniers – constitués de TPE et de petits investisseurs – ont permis au marché de la publicité sur les moteurs de recherche de mieux amortir la crise par rapport aux bannières du display.
La très grande part du search est représentée par Google, mais il y a aussi Bing (Microsoft) et Qwant. La filiale d’Alphabet voit sa position dominante légèrement d’effriter. Pour la première dans son histoire, Google va voir ses revenus au niveau mondial baisser cette année, de 5 %. « En France, sur la publicité digitale, Google n’échappe pas à cette tendance qu’illustrent les 9 % de baisse du search sur le premier semestre. Il a été impacté part la baisse ou la suspension des investissements publicitaires dans des secteurs tels que les transports/voyages, le luxe ou encore la billetterie », a indiqué Emmanuel Amiot, lors de la présentation de l’étude en visioconférence en live le 7 juillet dernier. Quant au retail search, qui englobe la commercialisation des espaces publicitaires sur les moteurs de recherches des sites web de e-commerce et commerçants traditionnels, il a bénéficié de la période de confinement et notamment sur le commerce alimentaire. Amazon en a été le premier bénéficiaire du retail search, même si le géant du e-commerce a dû cesser ses activités durant quelques semaines, suivi par Fnac Darty, RelevanC (filiale du groupe Casino) et Cdiscount (également filiale de Casino, via Cnova). De son côté, Facebook s’arroge une part toujours plus grande de la publicité sur les réseaux sociaux (le « social »), segment de marché de l’e-pub qui résiste le mieux par rapport au search et au display. Trois éléments expliquent la résistance du social, détaille le Oliver Wyman. Le premier réside dans une très forte traction d’Instagram qui appartient à Facebook comme WhatsApp et Messenger. Instagram connaît un succès en pratique, en audience et en revenus publicitaires. La deuxième explication est la part très importante de la long tail d’annonceurs dans le social, et peut-être plus encore qu’avec Google dans le search.
Les gros annonceurs ont fortement réduit leurs investissements dans le social. En revanche, il y a une accélération de la pénétration de la longue traîne grâce à des outils très simples d’utilisation, des campagnes à 1.000 euros qui permettent de soutenir ce segment de marché (branding, vidéo, engagement, mesure de la performance, data plus riche permettant un meilleur ciblage) et même de contrebalancer la baisse sur les gros annonceurs. Le troisième facteur de résistance du social se trouve chez les autres acteurs tels que LinkedIn et Twitter ou, avec une audience plus jeune, Snapchat et TikTok, qui ont connu un semestre relativement bon en raison de la diversification des dépenses des annonceurs.

E-pub : 5,4 milliards d’€ en 2020 (- 6,7 %)
Au total, le premier semestre 2020 de la publicité en ligne en France – marqué par deux mois de confinement (2) – a subit un recul inhabituel (- 8 %), à un peu plus de 2,5 milliards d’euros : dont 1 milliard pour le search (- 9 %), 0,6 milliard pour le social (- 5 %), 0,5 milliard pour le display (-17 %) et plus de 0,3 milliard pour les autres leviers (+4 %) que sont l’affiliation, les comparateurs et l’emailing. Sur l’ensemble de l’année 2020, le cabinet Oliver Wyman estime la baisse du marché publicitaire digital en France à -6,7 %, à 5,4 milliards d’euros – soit 1 milliard de manque à gagner par rapport à une croissance normale. Selon Warc (Ascential), la France est le pays d’Europe qui a enregistré avec le covid-19 l’un des plus forts reculs (-17 %) des investissements publicitaires. @

Charles de Laubier