Très haut débit : doute sur le « zonage » de l’Arcep

En fait. Le 5 mai, l’agence Aromates annonce que les Assises du très haut débit qu’elle organise chaque année avec l’Institut de l’audiovisuel et des télécoms en europe (Idate), se dérouleront – pour sa 4e édition – au Palais Bourbon le mercredi 16 juin (1). En présence, notamment, du sénateur Hervé Maurey.

En clair. Le sénateur de l’Eure, Hervé Maurey, lèvera un coin du voile sur le pré-rapport qu’il doit remettre « fin juin » au président de la République, lequel lui a confié en février dernier une mission sur le très haut débit. Auprès de Michel Mercier, ministre de l’Espace rural et de l’Aménagement du territoire, et de Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’Etat à l’Economie numérique, il est chargé trouver de quoi alimenter le Fonds d’aménagement numérique des territoires. Le sénateur de Haute-Normandie,
qui rendra son rapport définitif « en septembre » (et non en juillet), explique à Edition Multimédi@ que « des collectivités locales se heurtent au principe de zonages », retenu par l’Arcep et le gouvernement. Le découpage en « zone 1 » très peuplée, suivie de la « zone 2 » moins dense, puis de la « zone 3 » dans les régions les moins habitées,
« pose problème pour bon nombre de collectivités comme le Loiret ou la Manche », constate-t-il. Faut-il remettre en cause le zonage ? « La question de pose. Les collectivités territoriales qui souhaiteraient mettre en place une délégation de service public (DSP) ne pourront pas toujours le faire à cause du zonage, seule la “zone 3” pouvant bénéficier de subventions publiques », indique Hervé Maurey, qui a été entendu à ce sujet le 10 mai par le ministre Michel Mercier. Il s’inquiète, en outre, de
« l’attitude de l’opérateur historique » : « C’est Orange qui va délimiter ce que sera la “zone 2” par rapport à la “zone 3”. Mais s’il n’investissait pas tout de suite dans cette “zone 2”, il la figerait et empêcherait ainsi l’Etat d’y intervenir. Il faut par ailleurs que les fourreaux de France Télécom soient loués moins cher » (2). Quoi qu’il en soit, les 2 milliards du grand emprunt alloués au très haut débit ne suffiront pas à atteindre l’objectif présidentiel du « très haut débit pour tous d’ici à 2025 » qui devrait coûter – selon la Datar (3) – 30 milliards d’euros. « Il faut trouver des ressources. Cela pourrait passer par une taxe sur les lignes de cuivre [ADSL], afin d’inciter les opérateurs télécoms à migrer vers la fibre optique. Et l’Etat doit être acteur », explique le sénateur Union centriste, en regrettant que l’idée d’un opérateur national de réseau de fibre mutualisé – avancée par la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) – ait été écartée l’an dernier. @

France : trop de régulateurs pour être « neutre »

En fait. Lors du colloque du 13 avril sur la « neutralité du Net », une dizaine
de représentants de régulateurs – Arcep, CSA, Hadopi, CNIL et Autorité de la concurrence (manquait plus que l’Arjel, voire le juge !) – se sont succédés à
la tribune. Risque d’« incohérence » dans la régulation d’Internet.

En clair. Le débat sur la neutralité des réseaux repose la question de la régulation de l’Internet. Les autorités administratives indépendantes se bousculent autour du Net,
au point que leurs compétences respectives deviennent illisibles. Selon Denis Rapone, membre de l’Arcep, « la convergence et les nouveaux usages, tels que la vidéo à la demande ou la télévision de rattrapage, supposent des pouvoirs nouveaux des régulateurs. L’Arcep et le CSA doivent avoir une réflexion plus concertée et des avis croisés ». Mais il ajoute que l’on doit aussi s’interroger sur « les zones blanches de ces compétences concertées ». Régulation ? Corégulation ? Autorégulation ? Pour Isabelle Falque-Perrotin, présidente du Forum des droits sur l’Internet (FDI), « la convergence suppose l’articulation de l’action des régulateurs », régulateurs qu’elle a énumérés comme dans un inventaire à la Prévert : « CSA, Arcep, CNIL, Hadopi, …, juge constitutionnel ». D’autant que « la Net neutralité ne suffira pas dans un seul texte, car il y a le droit de la concurrence, le droit de la consommation, la liberté d’expression, … ». D’où, à ses yeux, « un risque de concurrence entre les régulateurs et d’incohérence ». Et de proposer : « pour résoudre cette question de l’interrégulation, il faut une plateforme neutre entre régulateurs pour qu’ils évoquent leur sujets communs. L’une des pistes à explorer est que le Conseil national du numérique joue ce rôle ». Or, le gouvernement tarde depuis un an à créer le CNN en concertation avec le FDI. Depuis une réunion interministérielle du Premier ministre le 20 novembre 2009, la question de savoir si le CNN est une évolution du FDI ou « la création d’une association ex-nihilo, suivie du transfert des actifs et du personnel du FDI » (1). La proposition d’Isabelle Falque- Perrotin a en tout cas séduit Emmanuel Gabla, membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) : « La plateforme commune mérite réflexion », a-t-il lancé, après avoir assuré qu’ « il y a déjà une coopération très entre les autorités ; les régulateurs se parlent ». Pour lui, « les [postes de] télévision connectés sont une traduction flagrante de la convergence [télécomsaudiovisuel] et un big bang des communications électroniques, ce qui pose – avec les nouveaux services de médias audiovisuels [VOD, Catch up TV, ndlr] la question des compétences en matière de règlement de différends entre l’Arcep et le CSA ». Le législateur devra clarifier. @

Le super-régulateur européen des télécoms est né

En fait. Le 28 janvier, les régulateurs nationaux des télécommunications des
27 Etats membres de l’Union européenne se sont réunis pour la première fois
à Bruxelles au sein du nouvel Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) créé en décembre 2009.

En clair. Le GRE est mort, vive l’ORECE ! Le Groupe des régulateurs européens
– jugé « peu structuré » – laisse place à l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques, lequel s’est réuni pour la première fois à Bruxelles.
Mais son siège reste encore à fixer. La Commission européenne se dote ainsi d’un
droit de regard et de veto sur les décisions que lui soumettront les 27 Arcep nationales. C’est l’aboutissement d’un combat (pas gagné d’avance) mené depuis près de trois ans par la commissaire européenne Viviane Reding – jusqu’alors en charge de la Société de l’information et des Médias et, depuis le 10 février, à la tête de la direction Justice, droits fondamentaux et citoyenneté. C’est le 27 juin 2006 qu’elle a surpris tout son monde en relançant l’idée d’un « régulateur européen des télécoms » supra-national. Ce que son prédécesseur, Erkki Liikanen, avait évoqué quatre ans auparavant pour
la première fois – le 29 juillet 2002 – lors de la création du Groupe des régulateurs européens (GRE). Erkki en avait rêvé ; Viviane l’a donc fait ! Au grand dam des régulateurs nationaux invoquant le « principe de subsidiarité » et mettant plutôt en avant leur Groupe des régulateurs indépendants (GRI) à eux – créé en 1997
sous l’impulsion de l’ancien président de l’Arcep (ex-ART), Jean-Michel Hubert.
La question d’un super-régulateur européen des télécoms est lancinante depuis le début de la libéralisation du téléphone. L’ancien directeur de la « DGXIII », Michel Carpentier, avait indiqué aux journées internationales de l’Idate en novembre 1997 qu’une « Agence européenne de régulation [était] envisageable ». Cette année-là,
le nom de Bruno Lasserre (actuel président de l’Autorité de la concurrence) était avancé pour présider cette éventuelle instance… Reste à savoir si l’ORECE sera bénéfique aux 500 millions d’Européens, à l’heure où les Vingt-sept doivent transposer le nouveau Paquet télécom d’ici à juin 2011. Objectif affiché : harmoniser les pratiques de régulation des réseaux (très) haut débit et de l’Internet mobile, en préservant le principe de neutralité du Net.
Cela au moment où Neelie Kroes – la nouvelle commissaire à la Stratégie numérique (1) – a comme priorité de mettre en place d’un « marché unique européen » des services en lignes et des contenus créatifs. @