OpenSea, l’ex-1ère plateforme d’échanges de NFT, dévalorisée, licencie mais prépare sa version 2.0

Son cofondateur Devin Finzer l’a confirmé : la société Ozone Networks (alias OpenSea), valorisée début 2022 plus de 13 milliards de dollars, licencie. Mais la première plateforme d’échange de NFT va tenter rebondir, sur un marché baissier et face à son nouveau rival Blur, grâce à « OpenSea 2.0 ».

« Nous avons pris du recul et repensé notre culture opérationnelle, notre produit et notre technologie, à partir de zéro. Et aujourd’hui, nous réorientons l’équipe autour d’OpenSea 2.0, une grande mise à niveau de notre plateforme – y compris la technologie sous-jacente, la fiabilité, la vitesse, la qualité et l’expérience. Nous aurons bientôt des expériences à partager avec vous. Aujourd’hui, nous disons au revoir à un certain nombre de coéquipiers d’OpenSea. C’est la partie la plus difficile de ce changement », a annoncé le 3 novembre Devin Finzer (photo), cofondateur et directeur général d’Ozone Networks, opérant la place de marché OpenSea (1).

Son actionnaire Coatue se désengage
Les premières plateformes d’échanges de NFT ont eu leur heure de gloire : OpenSea, Rarible ou encore Objkt. Mais plus encore pour OpenSea, dont la société éponyme a été créée par Devin Finzer et Alex Atallah à New York en décembre 2017. Elle deviendra rapidement la principale place de marché pour les jetons non-fongibles (NFT), assurant à elle seule près de 90 % des transactions au meilleur de sa forme en janvier 2022 – d’après Dune Analytics et Binance Research. A cette date, il y a près de deux ans maintenant, la valorisation d’OpenSea en tant que licorne atteignait son pic, à 13,3 milliards de dollars, après avoir levé 300 millions de dollars pour son financement lors d’un tour de table mené par les capital-risqueurs Paradigm Capital et Coatue Management auprès de plusieurs investisseurs (parmi lesquels Animaco Brands, A16z Crypto/ Andreessen Horowitz, …). Mais sous l’effet conjugué de l’effondrement du marché mondial des NFT l’an dernier (2) et de la remise en cause de sa position dominante par le challenger Blur lancé avec succès il y a un an, OpenSea a perdu de sa superbe.
La société newyorkaise Ozone Networks a confirmé le 3 novembre au site spécialisé Decrypt qu’il supprimait la moitié de ses effectifs, passant de 200 à 100 employés (3). De plus, le 7 novembre, le site The Information a révélé que Coatue Management a réduit de près de 90 % sa participation dans le capital d’OpenSea (4). La valorisation de cette ex-« crypto-trésor » (5) ne dépasserait pas 1,4 milliard de dollars, soit environ neuf fois moins qu’en janvier 2022. Le fonds newyorkais Coatue s’est aussi massivement désengagé de la société MoonPay, une fintech dédiée à la crypto et partenaire d’OpenSea. Le marché baissier – bear market, disent les investisseurs – l’est depuis l’éclatement des bulles « NFT » et « Crypto » fin 2021. Au premier trimestre 2022, le tracker canadien NonFungible constatait alors les dégâts sur un an : le nombre des ventes de NFT sur l’ensemble de la blockchain Ethereum – sur laquelle s’appuient de nombreuses plateformes (OpenSea, Rarible, Sorare, Polygon, The Sandbox, Cryptokitties, Audius, Shiba Inu, …) – avait chuté de presque moitié (47 %) à 7,4 millions et le nombre de d’acquéreurs de près d’un tiers (31 %) à un peu plus 1,1 million (6). L’année 2021 restera l’année de tous les records pour les NFT : 27,4 millions de ventes pour 17,7 milliards de dollars, impliquant plus de 2,3 millions d’acquéreurs. Les collections Bored Apes et Cryptopunks ont défrayé la chronique, sans parler de l’œuvre numérique « Everydays: the First 5.000 Days », adjugée aux enchères chez Christie’s le 11 mars 2021 plus de 69,3 millions de dollars (7).
Il faut dire que le « krach » du marché des jetons non fongibles (8) s’inscrivait dans un contexte d’inflation, de remontée des taux d’intérêt obligataires et de guerre, impactant aussi le Nasdaq (la Bourse newyorkaise de valeur technologique à forte croissance) et les cryptomonnaies (au premier rang desquelles le bitcoin). En valeur, le record journalier avait été atteint le 24 septembre 2021 avec 224.768 ventes ce jour-là pour une valorisation totale de 78,3 millions de dollars. Quant au nombre de vendeurs ou d’acquéreurs actifs de ces tokens de propriété, c’està-dire les utilisateurs détenteurs de portefeuilles actifs (active wallets), il s’était réduit à beau de chagrin : 12.000 au 26 mai 2022 comparés aux quelque 120.000 de l’automne 2021. Aujourd’hui, le marché mondial des NFT est toujours loin d’être au mieux de sa forme.

Son rival Blur prend la tête du marché
Cela n’a pas empêché une nouvelle place de marché, Blur, apparue en octobre 2022, de déloger OpenSea de la première place en s’arrogeant – d’après Dune à début novembre (9) – près de 70 % des transactions de jetons non-fongibles. OpenSea a été relégué à moins de 20 % de parts de marché en volume. Parmi les atouts de Blur : une faible commission de 0,5 % prélevée sur les opérations, contre 2,5 % pour OpenSea. Et – d’après The Block – la cryptomonnaie Blur, elle, a bondi après l’annonce des licenciements d’OpenSea pour atteindre une capitalisation de 402,5 millions de dollars (10). En attendant que le marché des NFT rebondisse. @

Charles de Laubier