Rien ne va plus à la Fédération française des télécoms, dont l’avenir reste incertain

La FFTélécoms, née en 2007 pour porter le lobbying des opérateurs télécoms,
va-t-elle disparaître ? Son budget a été réduit de moitié, ses effectifs aussi ; son directeur général Yves Le Mouël est donné partant ; Iliad-Free n’y adhère toujours pas. Le conseil d’administration du 14 décembre sera décisif.

Selon nos informations, le directeur général de la Fédération française des télécoms (FFTélécoms) depuis
sa création en 2007, Yves Le Mouël (photo), va partir.
Il quitterait ses fonctions d’ici la fin de l’année et cet organisme de lobbying des opérateurs télécoms qu’il a contribué à créer il y a huit ans. Son sort devrait être scellé lors de la prochaine réunion du conseil d’administration de la fédération prévue le 14 décembre. En a-t-il été question à Bercy le 27 novembre durant l’entretien entre la secrétaire d’Etat au Numérique, Axelle Lemaire, et le président de la fédération,
Didier Casas ?

2015 : une annus horribilis
Contacté par Edition Multimédi@, Yves Le Mouël s’est contenté de nous dire que
« les doutes ne sont plus de mise sur la pérennité de la fédération ». Ancien élève de l’ENSPTT et ayant exercé l’ensemble de sa carrière au sein de l’ancienne Direction générale des Télécommunications des années 1980, puis de l’ancien monopole
d’Etat France Télécom dans les années 1990, avant de devenir secrétaire général
de Wanadoo au début des années 2000, Yves Le Mouël n’aura pas résisté à la crise existentielle de la FFTélécoms. L’année 2015 aura été une annus horribilis pour cette fédération qui ne représente plus que dix-sept membres : trois grands opérateurs télécoms que sont Orange, Numericable-SFR, et Bouygues Telecom, ainsi que des acteurs de moindre taille : Auchan Telecom, Blancheporte Mobile (EI Telecom), CIC Mobile, Cofidis Mobile, Colt, Crédit Mutuel Mobile, La Poste Mobile, Legos, M6 Mobile by Orange, Naxos (RATP), NRJ Mobile, Prosodie (Capgemini), Worldline (Atos) et Verizon (1).
De plus, les montants des cotisations à la FFTélécoms ont été revus à la baisse en début d’année à la demande de Numericable-SFR qui avait envisagé il y a un an de
ne pas renouveler pour 2015 son adhésion – ayant racheté quelques mois plus tôt les membres SFR et Virgin Mobile. Ce qui avait provoqué une crise de représentativité à la fédération, ainsi que le risque d’un manque à gagner de plusieurs centaines de milliers d’euros par an. En outre, Numericable-SFR a obtenu la vice-présidence de la FFTélécoms en la personne de Jérôme Yomtov, secrétaire général de Numericable-SFR, sous la nouvelle présidence de Didier Casas, secrétaire général de Bouygues Telecom.

En début d’année, son prédécesseur Pierre Louette (2) avait lancé un appel au secours: « Il faut très vite des manifestations de la part de Numericable et de Free. Si aucun des deux ne revient, la FFTélécoms ne peut pas survivre » (3). Si Numericable-SFR a finalement adhéré en traînant des pieds, il n’en va pas de même de Free qui n’est plus membre de la fédération depuis 2009. Le groupe Iliad de Xavier Niel y a renoncé en justifiant il y a six ans que « les conditions de concurrence rendent difficile l’expression de positions communes sur des sujets structurants ». Le lancement de Free Mobile début 2012 n’avait pas arrangé ses relations avec les autres opérateurs télécoms, avec lesquels il n’était déjà pas sur la même longueur d’onde en matière de déploiement de la fibre optique. « Je lance aujourd’hui un appel aux dirigeants de Free. Il n’y a pas un bon et trois méchants dans les télécoms en France », avait déclaré Didier Casas en mai dernier (4), une fois élu président de la FFTélécoms. « Pas de commentaire », nous répond-on aujourd’hui chez Free, ce qui continue de fragiliser la légitimité de la fédération. Tandis que son budget de fonctionnement – 1,6 million d’euros en 2015
– a été réduit de moitié, les effectifs aussi. Ont ainsi dû quitter l’instance de lobbying : Dominique Martin, qui fut directrice de la communication puis la directrice générale adjointe ; Jean- Marie Danjou, qui a été son directeur général délégué après avoir été délégué général de l’Afom fusionnée en 2011 avec la FFTélécoms (5) ; Pierre-Yves Lavallade, qui fut directeur général adjoint en charge des relations avec le parlement
et les collectivités territoriales.

Perte d’influence et sous-effectif
Aujourd’hui, Yves Le Mouël est entouré d’une petite équipe de cinq personnes : deux assistantes (Ingrid Gibaut et Leila Daifi) et deux collaborateurs (Alexandre Galdin, responsable des études économiques et affaires parlementaires, et Jean-Marie Le Guen, directeur délégué aux contenus). Quant à la gouvernance de la FFTélécoms,
elle a été simplifiée et compte – outre le président Didier Casas et le vice-président Jérôme Yomtov – un secrétaire, Emmanuel Tricaud (directeur des affaires réglementaires et du développement de Colt) et un trésorier (Jérome Birba, directeur exécutif d’EI Telecom). La FFTélécoms est membre du Medef, mais ne figure plus à son comité exécutif. Sa perte d’influence pourrait lui être fatale. @

Charles de Laubier