Le gouvernement veut faire de SFR une affaire d’Etat

En fait. Le 20 mars, la Caisse des dépôts (CDC) – bras armé financier de
l’Etat et actionnaire de Vivendi à hauteur de 3,52 % avec le Fonds stratégique d’investissement (FSI) – fait son entrée dans la danse des prétendants au
rachat de SFR, en apportant son soutien à Bouygues qui a relevé son offre.

En clair. Bien que Vivendi et Altice, en négociations exclusives jusqu’au 4 avril pour le rachat de SFR par le second, soient des entreprises privées, l’Etat français est quand même décidé à jouer les stratèges. Dès le 14 mars, le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg déclarait sur France 2 que le rachat de SFR par Altice-Numericable n’était pas encore acquis. « Je crois que le débat continue. (…) Je ne suis pas certain (…) que les banques aient envie de s’exposer (…) outre mesure ». Deux jours après, c’était au tour de la Caisse des dépôts (CDC), de se dire prête, dans Les Echos (1), à « accompagner en capital un rapprochement entre Vivendi, SFR et Bouygues ». C’est donc chose faite depuis le 20 mars, puisque la CDC – actionnaire minoritaire non seulement de Vivendi mais aussi du groupe Bouygues – fait partie des
« actionnaires industriels et financiers de long terme » réunis par ce dernier pour relever son offre sur SFR (2).

Bouygues détiendra alors 67 % du capital du futur nouvel ensemble. Quant à la CDC, elle a indiqué à Reuter qu’elle participerait à hauteur de 300 millions d’euros à la nouvelle offre, ce qui lui donnerait environ 3 % au capital. De quoi ravir Arnaud Montebourg, lui qui avait apporté son soutien à Martin Bouygues lors de son projet initial de rachat de SFR – une fois son réseau mobile et ses fréquences revendus à Free. Même si c’est in fine au conseil de surveillance de Vivendi (3) de choisir entre vendre sa filiale SFR ou l’introduire en Bourse, et à l’Autorité de la concurrence d’autoriser ou pas la cession, l’Etat veut mettre son grain de sel dans cette affaire.
« Arnaud Montebourg donne une vision, sa vision, elle n’est pas toujours bonne,
mais il donne un souffle. (…) Au-delà [du 4 avril], les jeux étaient toujours ouverts »,
a confié à l’AFP le 15 mars Vincent Bolloré, PDG  du groupe éponyme et… membre
du conseil de surveillance de Vivendi.
Arnaud Montebourg a en outre tenté de rassurer sur la concentration du marché à venir : « Un retour à trois opérateurs [mobile] ne va pas créer de situation de monopole », assurait-il sur RTL le 11 mars. Et sur le front de l’emploi, Martin Bouygues avait adressé
le 10 mars un courrier au ministre dans lequel il s’engageait « à ne procéder à aucun licenciement collectif, plan social, plan de départ volontaire », promesse faite aussi dans une tribune dans Le Monde. @