Copie privée : la commission « Hadas-Lebel » veut aussi taxer l’iPad

La commission de rémunération pour la copie privée va adopter, le 16 avril, son plan de travail 2010. Chargée par le gouvernement de fixer les taxes prélevées sur les supports de stockage numérique, elle prévoit d’appliquer cette redevance aux tablettes multimédias.

Les 24 nouveaux membres de la commission de rémunération pour la copie privée vont être appelés, vendredi 16 avril, à voter un programme de travail chargé. Après les CD et DVD enregistrables, les baladeurs MP3, les magnétoscopes numériques, les appareils numériques de salon, les clés USB ou encore les téléphones mobiles multimédia, cette commission interministérielle (1) envisage de taxer d’autres produits dotés de capacités de stockage numérique.

Une première pour des ordinateurs
Selon nos informations, les tablettes multimédias – comme le Kindle d’Amazon, le Reader de Sony ou encore le tout nouveau iPad d’Apple – seront parmi les prochains terminaux à être mis à contribution au titre de la copie privée. Une réunion préparatoire s’est déjà tenue le 12 mars dernier en présence du nouveau président de la commission, Raphaël Hadas-Lebel, lequel a succédé en octobre dernier à Tristan d’Albis. Les consoles de jeux, les DVD Blu-ray enregistrables, ainsi que les équipements multimédias installés dans les véhicules, sont aussi dans la ligne de mire de ce que d’aucuns surnomment désormais depuis six mois la commission Hadas-Lebel (après l’avoir appelée durant cinq ans commission d’Albis). Pour l’ardoise iPad, est-ce une tuile ? C’est en tout cas la première fois que ce prélèvement est envisagé pour un ordinateur, si petit soit-il. En effet, bien qu’ils participent plus que jamais à la copie privée, les disques durs internes des ordinateurs – bureaux, mini-PC et autres netbooks – échappent comme par miracle à cette taxe…
Pour les tablettes multimédias, les recettes s’annoncent prometteuses. Comme les barèmes de la copie privée sont calculés en fonction des capacités de stockage des supports numériques enregistrables, les 16, 32 ou 64 Gigaoctets (Go) proposés selon les modèles de l’iPad, ils pourraient rapporter gros aux ayants droit de la musique, du cinéma et de l’audiovisuel (via leurs sociétés de gestion collective respectives). A titre indicatif, un smartphone de type iPhone ou Blackberry, ainsi qu’un décodeur de Canal+ à disque dur ou une Freebox à magnétoscope numérique sont déjà taxés de 8 euros au-delà de 10 Go l’unité et jusqu’à 50 euros si les 400 Go sont dépassés. Les tarifs pourraient être du même ordre pour les tablettes multimédias, ce qui n’est pas négligeable si l’iPad est vendu entre 549 et 899 euros en Europe comme l’affirme le magazine LSA. Ce prélèvement obligatoire sur le prix de vente, qui varie ainsi de quelques euros à plusieurs dizaines selon la capacité et l’usage de chaque catégorie de produits enregistrables (2), a été instauré pour « compenser le préjudice » engendré par « l’exception pour copie privée ». Il s’agit du droit des utilisateurs de faire des copies numériques des œuvres culturelles (musiques, films, écrits, …), à condition – conformément au code de la propriété intellectuelle – que la reproduction musicale ou vidéo reste uniquement dans un cercle restreint et familial.
Le total de ces redevances, prélevées actuellement sur dix catégories de supports d’enregistrement numériques, devrait atteindre environ 200 millions d’euros cette année (174 millions en 2008). Cette collecte est reversée à environ 50 % à la Société pour la rémunération de la copie privée sonore (Sorecop), à 46 % à Société pour la rémunération de la copie privée audiovisuelle (Copie France), les ayants droit de l’écrit (Sofia) et des arts visuels (Sorimage) se partageant le reste. Mais avant que le barème des redevances sur les tablettes multimédia ne soit établi, la commission Hadas-Lebel est tenue de faire réaliser une étude d’usages préalable. Cette analyse, qui sera confiée à un cabinet d’études indépendant – comme TNS-Sofres par exemple –, doit évaluer non seulement la pratique de la copie privée mais aussi appréhender le niveau de copies illicites pour ne pas prendre en compte ces dernières.

Etudes d’usages et piratage
Car le Conseil d’Etat – saisi par le Syndicat de l’industrie de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec) – avait annulé en juillet 2008 toutes les décisions de la commission d’Albis, laquelle n’aurait pas dû établir ses barèmes sans exclure de ses calculs les musiques ou les films téléchargés illégalement sur Internet et les réseaux peer-to-peer. Car, d’après la Haute juridiction administrative, compenser la copie privée par le piratage s’avère illégal (3). En outre, selon les fabricants, cela revenait à faire de
la rémunération pour copie privée « une forme de licence globale pour les copies illégales »… Certains membres de la commission Hadas-Lebel ont soulevé la question de « barèmes provisoires » avant de les fixer au vu des conclusions des « études et analyses » sur les usages réels de la copie privée sur les nouveaux supports. @