Déjà présent à Londres, après l’avoir été à Genève, Alibaba est déjà parti à la conquête de l’Europe

Maintenant que le géant chinois du e-commerce Alibaba vient de réaliser avec succès à New York la plus grosse introduction en Bourse de toute l’histoire, son fondateur Jack Ma est décidé à conquérir l’Europe, où il s’est d’abord implanté à Genève en 2007 puis à Londres depuis 2009.

Jack Ma« Nous allons nous développer fortement en Europe et en Amérique. Nous espérons devenir une entreprise globale », confiait pour la première fois le fondateur d’Alibaba, Jack Ma (photo). Il s’exprimait ainsi le 15 septembre dernier, lors d’une rencontre à Hong Kong avec des investisseurs, quatre jours avant l’introduction historique de son groupe à la Bourse de New York.
Si le désormais multimilliardaire et première fortune de Chine (1) mentionne l’Europe avant les Etats-Unis, ce n’est pas un hasard.

Du e-commerce B2B à l’audiovisuel et à la VOD
Le potentiel de croissance d’Alibaba en Europe est plus important que sur le marché américain déjà préempté par ses concurrents Amazon, eBay/PayPal et Twitter.
Le géant chinois du e-commerce est peu connu de part et d’autre de l’Atlantique.
En Europe, il dispose pourtant depuis 2009 d’un bureau à Londres dans le quartier
de Mayfair à côté de la City. Il a été un temps à Genève où il fut inauguré en grande pompe un premier bureau en octobre 2007, avant d’être fermé discrètement deux ans après pour une implantation dans la capitale britannique. Il y a sept ans, Abir Oreibi, qui fut directrice d’Alibaba.com Europe et Moyen-Orient, avait pour objectif de conquérir le Royaume-Uni, l’Italie, la Turquie, l’Allemagne, Dubaï et… la France. Alizila.com, un site web dirigé par un ancien journaliste de Time Magazine (Jim Erickson), a été créé il y
a quatre ans pour propager l’esprit « Alibaba » à travers le monde. Mais aujourd’hui, Alibaba n’est pas plus connu du grand public européen car son activité sur le Vieux Continent est essentiellement tournée vers le e-commerce B2B (Business-to-Business) via sa plateforme historique Alibaba.com, place de marché en ligne dédiée à l’import-export des entreprises. Elle se décline en plusieurs langues, dont le français sur le site French.alibaba.com.

Cette activité de gros (2) est devenue minoritaire dans le groupe chinois qui s’est diversifié auprès du grand public asiatique avec Taobao.com (équivalent à eBay), Tmall.com (comparable à Amazon) et Juhuasuan.com (sorte de Groupon). Ces trois plateformes de e-commerce ont généré sur le dernier exercice (clos le 31 mars 2014) 81,6 % du chiffre d’affaires d’Alibaba, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 8,44 milliards de dollars, en forte hausse de 52 %, pour un bénéfice net de 3,7 milliards de dollars – soit un bond des profits de 170 %. Et la croissance de ce dragon chinois promet encore deux ou trois chiffres pour l’année fiscale en cours. Son introduction en Bourse devrait conforter ce dynamisme, en lui apportant une notoriété internationale qui lui faisait jusque-là défaut en dehors d’Asie.
La firme de Hangzhou – capitale de la province chinoise du Zhejiang où Jack Ma a
créé Alibaba en 1999 et où se situe toujours le siège social du groupe (3) – dispose maintenant d’un trésor de guerre de 25 milliards de dollars levés auprès des investisseurs (4). Il va pouvoir lancer des acquisitions en Europe et aux Etats-Unis. Jack Ma avait déclaré le 30 septembre 2011 qu’il achèterait bien Yahoo (5), lequel est un actionnaire d’Alibaba (22,4 % du capital avant l’introduction d’Alibaba en Bourse, 15,2% après). Aux Etats-Unis, Alibaba a déjà investi au printemps dernier plus de 200 millions de dollars pour avoir 20 % du capital de TangoMe, société californienne de messagerie mobile multimédia qui développe en outre des chaînes live de musiques
et de vidéo (avec Hulu, Rhapsody, SoundCloud, Vevo, AOL ou encore Vimeo). Alibaba a surtout dépensé 1,22 milliard de dollars en mai pour une participation de 16,5 % dans le YouTube chinois, Youku Tudou, qui bénéficiera en outre d’un accord qu’Alibaba a passé cet été avec le groupe de divertissement américain Lionsgate afin de proposer en Chine un service de VOD en streaming.
Le groupe de Jack Ma a par ailleurs créé Alibaba Pictures, filiale de production et de distribution de films et de programme de télévision (issue du rachat de ChinaVision).
Il détient aussi 39 % de l’américain du ecommerce ShopRunner. Les autres conquêtes d’Alibaba ont aussi eu lieu en Chine : 66 % du capital de UCWeb (navigateur pour mobiles), 18 % de Weibo (Twitter chinois), acquisition de AutoNavi (cartographie), intérêts dans Wasu (broadcasting numérique).

Et dans l’audiovisuel et la VOD
On le voit, à l’instar du japonais Rakuten (maison mère du français PriceMinister racheté en 2010) qui se diversifie dans l’audiovisuel en ligne avec Wuaki (lire p. 5), Alibaba n’entend pas en rester au simple e-commerce. L’Europe pourrait être la prochaine cible en termes d’investissements et acquisitions audiovisuels d’Alibaba. @