La bataille des box est engagée pour prendre le contrôle des écrans de la maison

La maison devient un véritable champ de bataille. En France, le quasi monopole des FAI dans le salon est remis en cause par de nouveaux entrants (web, consoles de jeu, tablettes, téléviseurs connectés, …). Avec le « 2e écran » et la « 2e box », ils vont devoir se partager l’ARPU (1).

Par Charles de Laubier

Les box en sont aujourd’hui à l’an zéro. Elles en sont là où en étaient les smartphones
il y a quatre ans », a lancé Jean Varaldi, directeur marketing et développement chez Qualcomm, lors du Forum des télécoms et du Net organisé mi-juin par Les Echos.
« Le taux de remplacement des box va s’accélérer et les écosystèmes vont s’ouvrir »,
a-t-il prévenu.

De la « coopétition » à la concurrence
Sur l’Hexagone, la suprématie des box des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) – que sont sur ADSL Orange, SFR, Free ou encore Bouygues Telecom – est de plus en plus contestée. Pour l’heure, la France dispose d’un réseau ADSL de bonne qualité, le plus vaste au monde, utilisé par 95 % des abonnés haut débit, soit 21,2 millions d’abonnés.
Et près de 60 % d’entre eux reçoivent la télévision sur cette paire de cuivre. Pour les FAI, ce triple play est encore une chasse bien gardée qui fonctionne en service managé dit IPTV (Internet Protocol TeleVision) et bien sûr en vas clos. Les flux des chaînes de télévision, des services de catch up TV et de vidéo à la demande (VOD) y sont sanctuarisés. Mais ce walled garden en position dominante est de plus en plus soumis à la pression des nouveaux entrants venus du Web ouvert, les acteurs dits Over-The-Top (OTT), à commencer par Google, mais aussi des fabricants de consoles de jeux, tel Microsoft et sa Xbox (2), ainsi que des fabricants de TV connectées, de smartphones
et de tablettes, comme Samsung. Il ne manque plus que les box mobiles d’opérateurs 3G/4G diffusant leur propre Wifi dans la maison !

« Nous sommes en avance en France dans l’accès haut débit à travers des box mais il ne faut pas croire que les chose soient statiques. Il ne faut pas se reposer sur ses lauriers », a mis en garde Jean Varaldi. La multiplication des « 2e écran » écrans à domicile pousse les FAI à ouvrir leur box. Mais ces derniers craignent d’ouvrir la boîte de Pandore. « La maison connectée, nous y croyons avec les Smart TV comme il y a eu les smartphones. On pourra se connecter non seulement avec des box, mais aussi des téléviseurs intelligents, des set-top-box, des consoles de jeu ou des tablettes », a expliqué le dirigeant de Qualcomm. L’avenir de la box passe par une nouvelle génération qui devra s’ouvrir au monde de l’Internet, aux réseaux sociaux, à la musique en ligne, aux jeux en ligne dits massivement multi-joueurs (MMO) ou encore à la TV connectée. « Orange utilise déjà la Xbox comme box secondaire. Les opérateurs [télécoms] sont les mieux à même de commercialiser des abonnements Xbox Live ou des services à l’acte. Et Orange augmente ainsi son ARPU », a indiqué Laurent Schlosser, directeur de la division mobilité et opérateurs de Microsoft France. L’ère de l’unique box d’un FAI qui a le monopole du salon connecté est révolue. « La Xbox, c’est des jeux, mais aussi des loisirs, de la musique en ligne, de la VOD et de nombreuses applications accessibles dans toutes les pièces de la maison », a-t-il souligné. Mais derrière ce que certains FAI appellent déjà la « coopétition » avec les acteurs du Web et les OTT, il y a bien une concurrence avec eux. Les FAI sont donc contraints de changer de boîte. Après la Neufbox Evolution fin 2010 et la Freebox Revolution début 2011, c’est au tour de Bouygues Telecom de commercialiser – depuis le 18 juin dernier – sa box de nouvelle génération baptisée Bbox Sensation. S’ouvre-t-elle vraiment aux mondes connectés ? « La nouvelle Bbox offre la puissance du réseau en streaming haute définition (MPeg4), notamment pour le Cloud Gaming. La TV connectée fait aussi partie de l’écosystème. Mais la box aura toutes règles de sécurité pour diffuser la télévision en catch up TV en Wifi HD (3) sur les différents écrans de la maison », a expliqué Franck Abihssira, directeur des offres fixes, contenus et services chez Bouygues Telecom (4). De quoi rassurer les chaînes de télévision qui ont passé depuis de nombreuses années un pacte de distribution avec les FAI pour leur garantir la protection de leurs programmes audiovisuels linéaires ou en catch up TV. Pour Valéry Gerfaud, directeur général de M6 Web, c’est la condition sine qua non : « Nous voulons plus de débit, donc plus de qualité graphiques sur les box, mais avec toujours plus de sécurité pour protéger notre signal contre le piratage audiovisuel. Une box avec BitTorrent [faisant allusion à la Freebox Revolution, ndlr], ce n’est pas ce qui nous attire… », a-t-il prévenu (5).

Quid de la pub et la mesure d’audience ?
Autre préoccupation de M6 : « Il ne faudrait pas que le multi-tasking, avec le ‘’2e écran’’, vienne perturber la mesure d’audience de la chaîne par Médiamétrie. Ce serait embêtant. (…) Pas question non plus qu’il y ait sur notre signal de la publicité [venant d’un autre acteur] », s’est inquiété Valéry Gerfaud. La boîte de Pandore commence tout juste à s’ouvrir… @