Après Webedia, Terrafemina et Allociné, Fimalac pourrait s’emparer de Dailymotion dans sa conquête digitale

Jusqu’où ira Marc Ladreit de Lacharrière dans sa diversification numérique ?
Pris d’une frénésie d’acquisitions de sites web (Webedia, Terrafeminina, Allociné), le milliardaire fondateur de Fimalac accélère la consolidation dans
le secteur. Exclusif : ce qu’en pense le PDG de Dailymotion, Cédric Tournay.

MLdeLMarc Ladreit de Lacharrière, président fondateur de Fimalac,
et sa conjointe Véronique Morali, présidente de Fimalac Développement, s’intéressent à Dailymotion. Et ce, depuis l’échec des négociations entre Orange – propriétaire de Dailymotion – et Yahoo, à la suite de l’opposition du gouvernement (1) (*) (**).
Selon les révélations, non démenties depuis, de Paris Match
le mois dernier (2), les équipes du milliardaire « étudient de près
le dossier » et ont ainsi manifesté discrètement un intérêt pour le concurrent français de YouTube.

Pas de discussion Fimalac-Dailymotion : pour l’instant ?
Contacté par Edition Multimédi@, le PDG de Dailymotion, Cédric Tournay, nous assure qu’ »aucune discussion n’a été engagée » et que « le rapprochement Fimalac-Dailymotion n’est pas à l’étude ». D’autant que la holding de Marc Ladreit de Lacharrière est accaparée par d’autres dossiers dans sa conquête du numérique avec, coup sur coup, ses annonces de « négociations exclusives » en mai et juillet avec respectivement Webedia – intégrant Terrafemina – et Allociné – dont il vient d’acquérir 98 % du capital. Selon nos informations, les trois entités seront toutes fusionnées d’ici la fin de l’année.

La consolidation de l’Internet français est en marche
Ces opérations ne laissent pas pour autant indifférent Cédric Tournay : « Nous nous connaissons, avec les équipes de Webedia et de Fimalac. Je suis d’ailleurs impressionné par la démarche industrielle de Fimalac de constituer, en quelques semaines avec Webedia, Terrafemina et Allociné, un groupe de médias numériques aux ambitions européennes, voire mondiales ».

Dailymotion veut aussi participer à la consolidation
Et le patron de Dailymotion de poursuivre : « Nous sommes d’autant plus sensibles que Dailymotion est partenaire depuis 2009 de Webedia dans la vidéo, la publicité en ligne
et la coproduction de chaînes ». Pour lui, « la consolidation du marché des acteurs des contenus en ligne en France et en Europe est inéluctable et nous entendons bien en être un des acteurs ».
Dans ce contexte, un rapprochement entre Dailymotion et Fimalac ne ferait-il pas sens ? Estimant ne pas avoir à se prononcer sur une telle opportunité, Cédric Tournay s’en
tient à dire que « l’heure est à la prime à la taille critique » et qu’« il y a une logique à
se développer en France et à l’international ». Et de préciser concernant Dailymotion :
« Nous ne sommes pas dans une recherche active de partenaires mais nous poursuivons notre plan d’investissement et nos projets d’acquisitions pour un montant de 30 millions d’euros jusqu’en 2014 ».

Fimalac Développement au Luxembourg
Si Fimalac jetait son dévolu sur la plate-forme française de partage de vidéo à l’audience mondiale, c’est 115 millions de visiteurs uniques par mois et 2,5 milliards de vidéos vues par mois, selon ComScore à mai dernier, qui tomberait dans son escarcelle. D’autant que le tandem Marc Ladreit de Lacharrière et Véronique Morali veulent constituer « le 4e groupe média digital français [derrière Orange/Dailymotion, Lagardère Active, CCM Benchmark Group, ndlr] » et être « leader sur la thématique du divertissement ». Pour le milliardaire, classé par Forbes à la 19e place des plus fortunés de France en 2013 avec 1,35 milliard de dollars de patrimoine (3), l’objectif est de « renforcer son ambition de construire un champion français du divertissement armé pour affronter la compétition internationale et capable de défendre dans le monde numérique l’exception culturelle française ». Mais le nerf de cette guerre face aux géants du Net américains est la publicité en ligne, à savoir « les opérations spéciales publicitaires, la prospection pour les e-commerçants, le conseil, la production déléguée de contenus et le pilotage de communautés pour les marques et les entreprises (le “brand publishing”) ».
Mais ne cherchez pas dans le dernier document de référence de Fimalac des détails
sur sa diversification numérique, il n’y en a pas ! Et pour cause, la société F. Marc de Lacharrière (Fimalac), pourtant cotée à la Bourse de Paris (détenue à 80,1 % par les entités familiales Groupe Marc de Lacharrière et Silmer), est seulement une holding qui
n’a pas d’activité économique propre mais qui détient des participations dans plusieurs sociétés. Si l’on met à part la fameuse agence de notation financière Fitch, que Fimalac détient directement à hauteur de 50 % conjointement avec le groupe de médias américain Hearst Corporation, toutes les autres participations passent par une autre holding basée au Luxembourg : Fimalac Développement, filiale à 100 % de la maison mère. C’est par cette société luxembourgeoise (ex-Valparo) – créée en novembre 2006 pour « optimiser les placements de trésorerie » – que le groupe du milliardaire se diversifie dans les loisirs et l’hôtellerie de luxe (40 % du groupe Lucien Barrière et ses casinos), dans le divertissement (salles de spectacles de la société Vega et production d’événements
avec notamment Trois S), et maintenant dans les médias numériques depuis l’annonce
le 17 mai dernier de l’acquisition du groupe Webedia (éditeur de plusieurs sites web dont Purepeople ou Puremedias) pour 70 millions d’euros et de sa consolidations avec la société TF Co (éditrice du site web Terrafemina). A peine cette opération finalisée que Fimalac annonçait le 11 juillet des négociations exclusives avec le fonds d’investissement américain Tiger Global Management pour lui racheter Allociné, suivies le 16 juillet de l’acquisition de 98 % du capital pour 66,9 millions d’euros. Dans les deux cas, les ambitions sont clairement françaises et internationales : Webedia est déjà présent en Russie et au Brésil, tandis qu’Allociné est en Allemagne, en Turquie, en Espagne et aussi au Brésil. « A l’international, Fimalac fera profiter Webedia et Allociné de son savoir-faire pour accélérer leur développement », assure le groupe.
Véronique Morali, compagne du milliardaire, énarque comme lui, administrateur de Fimalac (où elle est entrée dès la création en 1990), vice-présidente de Fitch Group et présidente de Fimalac développement, est aussi présidente de TF Co (ex-Femmes Associées) qui édite le site web féminin Terrafemina fondé en 2008 (4),. Le nouveau pôle de médias numériques, qui compte afficher 50 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2013, regroupera Webedia, Terrafemina et Allociné (5),. Le nouvel ensemble sera dirigé par un directoire composé de Véronique Morali en tant que présidente, Cédric Sire et Guillaume Multrier, co-fondateurs de Webedia, ainsi que de Grégoire Lassalle (PDG d’Allociné). Quant à Marc Ladreit de Lacharrière, il sera le président du conseil de surveillance du groupe.
Quant au fils Jérémie Ladreit de Lacharrière, 36 ans, au conseil d’administration de la holding familiale Groupe Marc de Lacharrière (6), il pourrait être appelé en renfort dans le nouveau pôle digital de Fimalac. Après l’école d’ingénieurs en informatique Epita, il a fait ses premières armes chez Microsoft durant près de dix ans (sur MSN et Windows Live), puis a intégré en 2011 la filiale Vega au sein du groupe.

20 ans après l’achat de Valeurs Actuelles
Si Véronique Morali est au coeur de cette diversification digitale accélérée de Fimalac, le milliardaire, agé de 72 ans, n’est pas pour autant un inconnu de médias. Président de la Revue des Deux Mondes depuis 1991, il fut propriétaire du groupe Valmonde – éditeur de l’hebdomadaire Valeurs Actuelles – de 1993 jusqu’à sa revendre à Serge Dassault (lequel l’a revendu en 2006 à Pierre Fabre). Plus récemment, en 2007, il a tenté de s’emparer du groupe Les Echos avec l’aide d’Erik Izraelewicz, alors directeur de la rédaction, pour faire barrage à un autre milliardaire, Bernard Arnault. En vain. @