Ce que les consommateurs espèrent de la mission « Création et Internet »

Alors que la mission « Création et Internet » rend son rapport de propositions censées améliorer l’offre légale sur Internet et la rémunération des ayants droits, l’association de consommateurs UFC-Que Choisir espère avoir été entendue.
Son chargé de mission « TIC et commerce » explique ses propositions.

Le collectif Création-Public-Internet, auquel appartient UFC-Que Choisir, a proposé
à la mission Zelnik d’instaurer une « licence collective » de 5 euros par mois pour
les internautes, afin de leur permettre de télécharger de la musique ou des films légalement.
« Cette proposition a été plutôt bien accueillie et nous avons été longuement interrogés sur la faisabilité et l’impact de la mise en place d’une telle contribution obligatoire », confie Edouard Barreiro, chargé de mission à UFC-Que Choisir pour les TIC (1) et le commerce. « Même si, le lendemain, Frédéric Mitterrand (2) s’est malheureusement empressé de signaler qu’il n’accepterait pas une telle proposition », déplore-t-il.

« Licence collective »
Cette licence collective est totalement différente de la « licence musique » que prône de son côté l’ancien président du conseil d’administration de la Sacem (3). « La proposition de Laurent Petitgirard consiste en un abonnement à des sites privés (géré,semble-t-il, par les fournisseurs d’accès à Internet), forcément avec DRM (4), et sans aucune garantie en matière de diversité. Nous, nous voulons légaliser l’échange », explique Edouard Barreiro. Selon ce dernier, cela permettrait de faire disparaître le piratage
et donc la répression, et garantirait un vrai accès à la diversité culture. C’est au consommateur de faire la promotion de ses artistes préférés et de déterminer leur rémunération. La solution du collectif Création-Public-Internet propose de travailler sur les clés de répartition pour que les artistes bénéficient d’une rémunération équilibrée.
Mais le principe de « licence globale » est toujours loin de faire l’unanimité. Pour l’association de consommateurs, « le système actuel, bien que totalement obsolète, rapporte encore beaucoup à certains acteurs majeurs qui ont l’oreille du président ». Reste que le marché évolue très vite. Pour Edouard Barreiro, il y a d’un côté les consommateurs qui rejettent de plus en plus l’offre commerciale totalement inadaptée,
et de l’autre les artistes « qui commencent à percevoir l’absurdité du système et qui gagnent de moins en moins d’argent, alors même que la production et la diffusion des œuvres coûtent de moins en moins cher ». Radiohead et NIN n’ont-ils pas choisi de s’autoproduire et Eminem de traîner sa maison de disques en justice ? Si les forfaits musicaux se développent, UFCQue Choisir constate qu’ils sont encore d’une piètre qualité (DRM, absence d’exhaustivité, etc.). Côté cinéma, l’absence de forfait donnant accès à des films récents – c’està- dire 4 mois après leur sortie en salle comme cela
est le cas pour la vente à l’unité – tient essentiellement, selon l’association, au lobby des télévisions payantes et des exploitants de salles de cinéma. Ceux-ci ne souffrent pourtant pas de la concurrence de la vente au détail de films ou du partage de fichiers. « C’est fort dommageable car un grand nombre de foyers seraient prêts à payer ce type de forfaits. Pour des films de plus de 36 mois, comme c’est actuellement le cas, c’est tout simplement impensable », souligne Edouard Barreiro.
Le collectif Création-Public-Internet a outre proposé un régime de gestion collective pour les plateformes de streaming audio et vidéo, cette idée fut cependant accueillie sans grand enthousiasme. « La raison d’être de la mission Zelnik est peut-être plutôt
de trouver une nouvelle taxe à peu près acceptable pour acheter la paix pour quelques années.
C’est un grand classique, certains dans la filière culturelle râlent à juste titre : soit on taxe pour lui trouver de nouveaux revenus,soit on crée des abattements fiscaux ». Mais pour l’association de consommateurs,cela ne résout rien et les problèmes perdurent. @

FOCUS

Catalogues de musiques ou de films : des « facilité essentielle » ?
Pour UFC-Que Choisir, la nouvelle autorité Hadopi est dépourvue de moyens et
sans utilité. « On aurait préféré qu’on lui donne un pouvoir de régulation ». Car, selon l’association de consommateur, la pauvreté de l’offre musicale ou cinématographique
tient essentiellement à la difficulté pour un distributeur ou un diffuseur à accéder aux catalogues. Or, selon elle, ces accès aux catalogues de films ou de musiques, constituent une facilité essentielle. « Parce que chacun d’entre eux est unique, il est nécessaire à un distributeur ou un diffuseur pour être attractif et donc concurrentiel », explique Edouard Barreiro, chargé de mission à UFC-Que Choisir. Leur accès doit
donc être permis, à des conditions tarifaires raisonnables, non discriminatoires et
de manière transparente pour tous. Comme pour une infrastructure physique, ces conditions doivent être garanties par un régulateur : soit de manière ex-ante en encadrant les conditions d’accès aux catalogues, comme le fait l’Arcep par exemple pour la boucle locale de téléphonie fixe, soit de manière ex-post en cas d’abus, avec
un pouvoir similaire à celui relatif au règlement de différends.