GeowebTrotter

Avec l’été, c’est le temps des grandes migrations qui revient pour certains d’entre nous, avec un nouvel intérêt pour
la géographie. Plus prosaïquement, c’est le temps de l’organisation de voyages à l’aide des ressources phénoménales que mettent à la disposition du plus grand nombre les avancés conjuguées de la Néogéographie et
du Geoweb. Inauguré par le développement rapide des systèmes d’information géographique (SIG) au début des années 80, puis rapidement portées sur Internet, le Geoweb naquit véritablement en 2005, au moment du lancement de Google Maps. La recette de Marcel Gotlib, pour plier une carte en une seule fois, devint inutile. Et c’est le lancement la même année de Google Earth qui a illuminé nos écrans en ouvrant une fenêtre magique, non pas sur le monde, mais sur notre planète bleue : nous pouvions presque la tenir dans notre main, jouer avec, zoomer à s’en donner le vertige, aller en un clic de chez soi aux pyramides, de la cité interdite à la maison séculaire de nos grands-parents. Comment ne pas penser à l’émerveillement d’un Christophe Colomb qui aurait trouvé sa route des Indes en trois clics ? Nous étions tous changés en astronaute de chambre, en démiurge de salon jouant avec le monde ! Mais la puissance de ses applications géographiques d’un nouveau genre réside désormais dans le flot d’applications composites, ou mashups, qui surgissent sans cesse.

« Le Geoweb 3.0, en alliant les fonctionnalités de l’Internet mobile, du web sémantique, des réseaux sociaux, du “Web data”, de la 3D et de l’Internet des objets, a encore amplifié le phénomène ».

En croisant la puissance de la géolocalisation avec la plupart des applications connues
ou à venir, apparaissent une multitude de nouveaux services à la puissance de calcul étonnante. Bien sûr dans ce fourmillement d’innovations, certaines sont seulement ludiques, d’autres simplement inutiles et d’autres encore incompatibles avec notre code actuel du respect de la vie privée. Mais il en reste de très nombreuses qui, au fil de leur diffusion, amplifient véritablement la puissance du Net. Dès 2010, au début de l’ère de
l’« Open data », une ville comme San Francisco a rendu accessible plus de 150 bases
de données en proposant pour certaines des applications géolocalisées, comme Crime spotting qui permet de visualiser les crimes de son quartier ou EtCetera pour connaître
les noms de ses voisins. Le Geoweb 2.0 a ensuite permis aux internautes de contribuer directement à l’enrichissement des applications : compléter des cartes, poster des informations de trafic en temps réel, publier des photos en direct ou des notes de voyages au fil de l’eau, … Le Geoweb 3.0, en alliant les fonctionnalités de l’Internet mobile, du web sémantique, des réseaux sociaux, du «Web data », de la 3D et de l’Internet des objets, a encore amplifié le phénomène : localiser ses amis en temps réel, choisir sa résidence de vacances en visite immersive, comparer les prix des restaurants du voisinage en réalité augmentée, …
La création aussi y a trouvé de nouvelles sources d’inspiration : le dernier thriller historique multimédia installe le scénario d’une quête planétaire dans des lieux ancestraux où des lecteurs m’ayant devancé ont laissé leur propres annotations, photos ou vidéos comme autant de signes me permettant d’avancer dans un récit non linéaire et constamment enrichi. Le Geoweb peut en outre nous aider à organiser des secours en cas d’accidents, de crise ou de catastrophe. Il a également une face sombre lorsqu’il jongle avec nos données personnelles. Par exemple, Foursquare, outil de réseau social, de jeu et de microblogging lancé en 2009, permet à l’utilisateur d’indiquer où il se trouve et de rencontrer ainsi ses contacts, tout en attirant une manne publicitaire hyper-locale. Ce service a suscité une contre-application, pleaserobme.com, qui permet à d’éventuels cambrioleurs de mettre à profits ses informations inespérées. Ça y est, il faut partir !
Cette année les vacances seront improvisées. L’ordinateur de bord de la voiture, interconnecté à nos terminaux mobiles, permet de trouver à chaque étape le meilleur compromis en termes de lieu, d’hébergement et de prix. Il nous reste tout le temps pour profiter des paysages et méditer sur ce mot de Paul Virilio, qui affirmait en son temps
que « désormais, la vitesse est vraiment devenue notre milieu, nous n’habitons plus la géographie mais le temps mondial. » @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » : la chronologie des médias
Depuis 1997, Jean-Dominique Séval est directeur marketing et
commercial de l’Idate. Rapport sur le sujet : « GéoWeb et marchés
Internet hyper locaux » (Innovation Report) par Maxime Baudry.