Comment Libération va mettre le web avant le papier

En fait. Le 16 septembre, trois dirigeants du journal Libération – Laurent Joffrin (Directeur de la publication et de la rédaction), François Moulias (président du directoire) et Pierre Fraidenraich (directeur opérationnel) – étaient les invités
de l’Association des journalistes médias (AJM). Déclarations.

En clair. Libération est le premier quotidien français à inverser la vapeur. Désormais, le site web du journal, Liberation.fr, sera désormais « la priorité » éditoriale. « On change complètement la logique : chaque service de la rédaction va animer son propre site avec sa page d’accueil. Dans les contenus que l’on mettra en ligne, il y aura une partie qui sera utilisée pour faire le quotidien [imprimé] », a expliqué Laurent Joffrin, précisant qu’il y aura ainsi « six sous-sites web » et que « les scoops seront gérés au cas par
cas ». C’est donc la fin de la dominance du papier et un recentrage de la production sur le Web, sous la houlette du « numéro un bis » Johan Hufnagel (cofondateur de Slate.fr
et ancien de 20minutes.fr). Il ne s’agit pas, assure-t-il, de faire travailler les journalistes trois fois plus, mais de « tout mettre en ligne » en proposant du gratuit et du payant
« au compteur » (metered paywall).

Objectif : 37.000 abonnés numériques d’ici 2017, contre 26.000 actuellement. « Le centre de gravité du flux de production de l’information sera digital. L’ensemble des forces de la rédaction – 130 journalistes [au lieu de 180 aujourd’hui, ndlr (1)] – seront d’abord mobilisées sur le numérique », a abondé Pierre Fraidenraich, DG de la holding PMP de Bruno Ledoux (2), nouveau propriétaire de « Libé ». Quant au journal imprimé, il aura une nouvelle formule au premier semestre 2015 grâce aux moyens apportés par les actionnaires, lesquels ont renfloué Libération par une augmentation de capital effectuée le 31 juillet dernier à hauteur de 18 millions d’euros, essentiellement du milliardaire Patrick Drahi (Altice/Numericable). « Et il est probable qu’on leur demande une rallonge », a indiqué Laurent Joffrin. Le besoin de financement est de 8 à 10 millions d’euros, indique François Moulias, alors que 11,4 millions sont déjà consommés.

« Nos actionnaires ne veulent pas être propriétaire du tonneau des Danaïdes ! », a prévenu Laurent Joffrin. Les actionnaires veulent construire un « groupe multimédia » et envisagent « des acquisitions de sites web mais pas seulement ». Pierre Fraidenraich confirme en outre « le projet de fourniture de contenus pour une radio
sur la RNT avec Goom Radio comme partenaire », sur la base de Liberadio.goomradio.com. Le site du journal, qui se veut aussi « syndicateur de contenus », distribuera Le Bondy Blog à partir du 30 septembre. @