L’âme des objets

Je me souviens d’un temps que j’ai bien connu, où les
objets étaient simplement… des objets inanimés et où
l’on se plaisait à imaginer qu’ils pouvaient avoir une âme. Aujourd’hui, parmi les milliards d’objets qui nous entourent et qui nous servent, une forte proportion sont dit
« intelligents ». Grâce à une puce intégrée, ils sont porteurs de leur identité ; ils enregistrent des informations et parfois communiquent entre eux et surtout avec nous ! Les possibilités offertes par ces nouvelles propriétés semblent infinies… L’avènement des objets intelligents dans notre quotidien a été
une véritable révolution.
Révolution douce et irréversible de nos habitudes, aux conséquences sociales et économiques profondes, comme en son temps la machine à laver ou le réfrigérateur.
Ce matin après avoir claqué la porte, mon manteau s’est immédiatement adapté aux conditions extérieures – pluie légère et froid piquant –, tandis que son col, qui intègre l’ensemble des outils de communication de base, me permet d’écouter les nouvelles
du matin sur ma station radio préférée. Un rapide coup d’œil sur la manche droite me permet de prendre connaissance du planning de la journée. Je n’ai même pas eu besoin de sortir mon téléphone mobile pour prendre un premier appel : le micro et l’oreillette intégrés dans le col permettent de répondre directement.

« Mon téléphone mobile est quant à lui devenu
une
véritable télécommande universelle, ou encore
mieux,  
une souris me permettant d’agir sur l’espace
qui m’entoure. »

Mon téléphone mobile est quant à lui devenu une véritable télécommande universelle,
ou encore mieux, une souris me permettant d’agir sur l’espace qui m’entoure. D’un clic dirigé vers une affiche annonçant un concert qui m’intéresse, j’obtiens immédiatement
les informations utiles : les détails sur le programme, les dernières critiques et les places encore disponibles. Si je veux, je peux réserver à l’instant.
Je suis rassuré, car je viens de recevoir les alertes – toutes au vert – du bulletin
de santé quotidien de mon père, enregistré par sa puce implantée qui mesure les indicateurs clés et les transmets à son médecin et à ses proches. Son état nécessite une vigilance constante, et nous sommes rassurés de savoir que nous pouvons lui venir en aide rapidement si cela s’avére nécessaire.

Il m’arrive encore d’être surpris lorsque je rentre le soir chez moi et que mon salon tout entier s’adapte instantanément à mes goûts, de la lumière d’ambiance aux motifs sur les murs en passant par ma musique préférée du moment. L’Internet aujourd’hui, ce sont près de 3 milliards d’êtres humains connectés, contre 1 milliard en 2008. Mais
ce sont également 20 milliards de sites Web correspondant à des lieux virtuels et
des objets communiquant les uns avec les autres en permanence, sans intervention humaine.
Ce sont enfin 200 milliards d’objets communiquant et tous associés à leur site Web : objets intégrés dans les murs, robinets, poignées de portes, réfrigérateurs, clés, automobiles, vestes, parapluie, valises, sacs à main, pacemakers, téléphones portables… Auxquels s’ajouteront sans doute bientôt d’autres milliards de poussières intelligentes ou « smart dusts » : une galaxie de micro-machines – puces équipées de capteurs, senseurs, processeurs, radios et générateurs qui forment, par leur nombre, un réseau communicant – intégrées dans notre environnement et régulant notre vie quotidienne. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique “2020” : La radio
* Depuis 1997, Jean-Dominique Séval est directeur marketing et
commercial de l’Idate (Institut de l’audiovisuel et des télécoms en
Europe). Rapports sur le sujet : « M2M : The Machine-to-Machine
Market » de Samuel Ropert et « RFID & Internet of Things »
de Vincent Bonneau – www.idate-research.com