Un livre blanc prône la régulation du smart contract

En fait. Le 4 octobre dernier, a été divulgué par l’association Paris Place de Droit un livre blanc intitulé « Quel avenir pour le smart contract en France ? Oser la vitesse sans la précipitation », dont les coauteurs sont l’avocat Fabrice Lorvo (FTPA) et l’étudiant Timothée Charmeil (Harvard Law School).

En clair. Lors de sa « Nuit du Droit », qui a eu lieu le 4 octobre au Tribunal de Commerce de Paris, l’association Paris Place de Droit – créée en 2015 pour promouvoir la capitale de la France comme place juridique internationale – a présenté un livre blanc sur le smart contract (1). La traduction en français est « contrat intelligent » mais les auteurs la jugent « trompeuses ». « Le smart contract, tel qu’utilisé aujourd’hui, peut alors être défini comme le protocole informatique organisant l’échange automatique d’actifs dématérialisés enregistré sur une blockchain » expliquent les coauteurs Fabrice Lorvo (avocat, cabinet FTPA) et Timothée Charmeil (Harvard Law School).
Le smart contract permet ainsi de fusionner en un seul acte – certifié et authentifié sur la blockchain – la conclusion du contrat et son exécution, de supprimer l’intervention des intermédiaires comme le banquier ou l’huissier de Justice, et de rendre inéluctable la phase d’exécution du contrat lorsque les conditions sont objectivement réalisées. « En effet, souligne le livre blanc de la commission “numérique et juridique” de l’association Paris Place de Droit (2), nul ne peut empêcher l’exécution du smart contract dans les conditions prévues par le code enregistré dans la blockchain ». L’exécution est alors irréversible. Et ce, « quoi qu’il en coûte ». Si le smart contract est une réalité omniprésente, ne serait-ce que dans les conversions entre les dollars, euros et autres yen (monnaies dites « fiat », traduit « décret » en anglais car relevant de la politique monétaire des banques centrales des Etats) et les cryptomonnaies (bitcoin, ethereum, ripple, etc.), il n’en est pas moins un objet juridique non-identifié (OJNI) venant d’« un univers numérique plus complexe encore » (wallet, actifs électroniques, cryptomonnaies, blockchain, NFT (3), …).
« Théoriquement, tous les contrats d’affaires pourraient prendre la forme de smart contract. […] Malgré des avantages indéniables, le smart contract présente également des inconvénients tout aussi indéniables [cas de non-paiement, code informatique méconnu, absence de consentement, mauvais codage, litiges, anonymat, asymétrie d’information entre auteurs et mineurs, ou encore absence de norme sur les algorithmes]. Inconvénients qui nécessiteront l’adoption d’une réglementation qui semble ne pouvoir être qu’internationale », affirment les coauteurs. Si ce n’est, via le Data Act (4), européenne. @

Cybermenaces : bombe électronique à retardement

En fait. Le 14 octobre se terminent à Monaco les 23e Assises de la cybersécurité qui se sont tenues sur quatre jours. Les cyber-risques n’augurent rien de bon, tant les cyberattaques n’ont jamais été aussi redoutables avec le renfort de l’intelligence artificielle et maintenant de l’informatique quantique.

En clair. Sauve qui peut. Les responsables de la sécurité des systèmes d’information (RSSI) des entreprises et administrations, et leurs dirigeants, ont du souci à se faire. Jamais les cybermenaces et les cyberattaques n’ont été aussi fortes et nombreuses dans le monde. Internet devient le premier théâtre des opérations de la criminalité, de la guerre et de l’ingérence étrangère, tant économique que géopolitique. Cybersécurité et cyberdéfense n’y suffiront pas.
Aux 23es Assises de la cybersécurité (1), à Monaco, les quelque 5.000 visiteurs – Chief Information Security Officer (Ciso) en tête – auraient préféré ne pas verser dans le catastrophisme ni dans les théories du cybercomplot. Hélas, les prévisions sont plus que jamais alarmistes. Steve Morgan, fondateur de la société d’études américaine Cybersecurity Ventures, le confirme à Edition Multimédi@ : « Depuis trois ans, nos prévisions n’ont pas changé. Les coûts mondiaux des dommages liés à la cybercriminalité augmentent de 15 % par an et atteindront 10.500 milliards de dollars en 2025, contre 8.000 milliards de dollars en 2023. C’était 3.000 milliards de dollars en 2015 » (2). Rien que pour 2023, selon nos calculs, le cybercrime mondial pèse financièrement plus de deux fois et demie le PIB de la France, et plus de mille fois le PIB de la Principauté de Monaco où se tiennent chaque année ces Assises de la cybersécurité ! « Cadence des attaques, émergence des innovations [IA, quantique, deepfake, …, ndlr], rotations dans les équipes, profils des attaquants, environnement social et géopolitique, … : le RSSI est sous pression », a confirmé en session plénière (3) Sabrine Guihéneuf, présidente d’honneur 2023 de ces assises internationales, par ailleurs directrice de la cybersécurité et de la gouvernance IT du groupe français URW (4). Certains, comme chez l’électronicien Thales, s’attendent à « l’Apocalypse quantique ». D’autres, comme chez l’hypermarchant Carrefour, craignent les IA génératives dans le retail et le e-commerce. L’équipementier télécoms américain Cisco s’attend, lui, au pire durant les JO de 2024 à Paris.
Se cyberdéfendre à armes égales contre les hackers du monde entier (cryptage et vol de données, rançongiciel, Dos/DDoS (5), hameçonnage, authentification frauduleuse, deepfake, etc.), supposent aux victimes potentielles de recourir elles aussi à l’IA et à la cryptographie quantique voire post-quantique. @

Après sa faillite, Vice Media tente une remondata

En fait. Le 18 septembre, la directrice opérationnelle de Vice Media, Cory Haik, a donné des nouvelles de ce groupe de médias américain qui a fait faillite en mai et a été repris en juin par un consortium d’investisseurs mené par Fortress Investment. « VMG » se donne 12 à 18 moins pour être rentable et mois endetté.

En clair. Annus horribilis. C’est ce qu’a vécu depuis le début de l’année Vice Media Group (VMG), après la démission en février de sa PDG Nancy Dubuc et la mise en faillite de l’entreprise en mai (1). Ce groupe canadien de médias et d’audiovisuel, fondé il y aura 30 ans l’année prochaine à Montréal et s’adressant aux jeunes et jeunes adultes, a trouvé repreneur en juin dernier.
Un des créanciers de VMG, Fortress Investment Group, a constitué un consortium d’investisseurs – dont Soros Fund et Monroe Capital – pour racheter l’éditeur de Vice News, Vice.com, Vice Studios ou encore Vice TV (ex-Viceland). A l’origine de la banqueroute : le surendettement. « La mise en faillite et la vente à Fortress Investment Group nous a permis de restructurer la dette », a assuré Cory Haik, directrice opérationnelle de VMG, lors de son intervention le 18 septembre dernier à Miami, en Floride, où se tenait durant trois jours le Digiday Publishing Summit qui réunissait les dirigeants médias pour parler des nouvelles sources de revenus. Cory Haik est entrée chez Vice Media il y a près de cinq ans en tant que Chief Digital Officer, avant d’en devenir il y a tout juste un an la Chief Operating Officer. Auparavant, elle a été plus de cinq an ans au Washington Post comme responsable d’initiatives numériques et de nouvelle stratégie éditoriale aux niveaux national et international. « Le processus de reconstruction de VMG prendra de 12 à 18 mois. Mais nous avons l’intention d’atteindre au bout du compte la rentabilité », a-t-elle indiqué.
Vice News, la chaîne d’actualité décalée créée il y a dix ans, prospère sur YouTube, où, selon Cory Haik, elle a atteint son seuil de rentabilité (break-even). VMG s’est diversifié au cours de ses presque 30 ans d’existence en partant du magazine mensuel Vice (2) gratuit et international, créé en 1994 et axé sur la culture urbaine (3), la musique le style de vie, la photographie, l’art et les sujets de société. Il y a eu jusqu’à 24 éditions mondiales imprimées du magazine, le digital ayant pris le relais, avec notamment Vice.com qui compte aujourd’hui plus de 20,5 millions de visites par mois (4). « Les activités d’édition [magazine, livres, ndlr] sont proches de la rentabilité. (…) Nous allons lancer au premier semestre 2024 une offre gratuite comprenant le retour du magazine imprimé Vice en plus de contenus exclusifs », a aussi annoncé la COO de VMG. @

Vidéo : est-ce bien utile de baisser la qualité ?

En fait. Le 13 septembre, la recommandation de l’Arcom pour réduire l’empreinte environnementale du numérique a été publiée au Journal Officiel. La vidéo représentant 65 % du trafic Internet, sa haute définition se retrouve dans le collimateur des écoresponsables. Pourtant, elle a peu d’impact sur le climat.

En clair. La HD, le Full HD et la 4K, qui offrent des résolutions d’images vidéo de respectivement 720p, 1.080p et 2.160p (1), sont dans le collimateur à la fois de l’Arcom (régulateur de l’audiovisuel), de l’Arcep (son homologue des télécoms) et de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie). Les vidéos haute définition ne sont plus en odeur de sainteté dans la France de la « sobriété numérique ». Et comme la vidéo pèse pour 65 % du trafic Internet, d’après la société d’analyse Sandvine (2), les Netflix, YouTube (Google) et autres Twitch (Amazon) vont devoir montrer pattes « vertes » aux régulateurs à partir de 2024. Parmi les mesures recommandées par l’Arcom aux chaînes de télévision, services de médias audiovisuels à la demande (SMAd) et plateformes de partage de vidéos : inciter les internautes à baisser de la qualité des vidéos.
Mais dégrader l’image sera-t-il vraiment utile ou est-ce pour se donner bonne conscience ? « Contrairement à une série de reportages trompeurs dans les médias, les impacts climatiques de la vidéo en streaming restent relativement modestes », avait calculé fin 2020 George Kamiya (3), alors analyste numérique et énergie au sein de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Dans Le Monde, il avait même dit début 2022 : « L’impact carbone du streaming vidéo en Europe serait, selon mes calculs, entre 35 grammes et 80 grammes par heure, ce qui revient à faire bouillir l’eau contenue dans une bouilloire à une ou deux reprises ou à rouler entre 200 et 400 mètres dans une voiture conventionnelle » (4). L’impact de la vidéo en ligne sur le climat est donc quasi nul.
Qu’à cela ne tiennent, la France s’en prend à la qualité vidéo. Quand bien même certaines plateformes – Comme YouTube Premium – réserve le Full HD à leurs abonnés payants. Dans le cadre de la loi « Reen » visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique, promulguée il y a près de deux ans (5), la recommandation de l’Arcom – datée du 26 juillet 2023 et publiée le 13 septembre au Journal Officiel (6) – demande à tous les acteurs de l’audiovisuel de mettre en place un « référentiel par catégorie de produit ». Et ce, pour calculer l’impact environnemental des usages vidéo et d’en informer les utilisateurs pour les inciter à avoir « des comportements plus sobres » (comme réduire la qualité vidéo). Prochaine étape : une campagne de communication commune à la filière. @

Google : Amit Mehta, le juge du « procès du siècle »

En fait. Le 12 septembre s’est ouvert à Washington « le procès du siècle », selon l’expression utilisée par The American Prospect pour désigner l’affaire « United States versus Google ». Choisi au hasard pour présider ce procès : le juge Amit P. Mehta. Cet Indo-américain pourrait démanteler la filiale d’Alphabet.

En clair. Avec ses 90 % de parts de marché, Google est ainsi accusé – depuis trois ans (1) par le département américain de la Justice (DoJ) – d’abus de position dominante et de constitution de monopole. Ironie de l’histoire, c’est ce juge Indo-américain – Amit Mehta, né en 1971 à Patan en Inde – qui fait face à cet autre Indo-américain, patron d’Alphabet et de sa filiale Google – Sundar Pichai, né en 1972 à Madurai, en Inde également.
Amit Mehta préside ce « procès du siècle », comme l’appelle le magazine The American Prospect (2). Cet avocat a été nommé en décembre 2014 juge du district de Columbia (3) par Barack Obama et en juin 2021 membre de la Cour de surveillance du renseignement étranger des Etats-Unis (FISA Court).
Pour présider cette affaire « United States v. Google » qui est jugée depuis le 12 septembre à Washington, le juge Amit Mehta a été désigné au hasard. Ce procès historique hors norme – 150 personnes entendues et plus de 5 millions de pages de dossiers – devrait durer trois mois. Cet amateur de musique hip-hop préside par ailleurs les procès liés à l’attaque du Capitole de janvier 2021, où Donald Trump est parmi les accusés. Si le moteur de recherche Google – créé il y a maintenant 25 ans (4) – est vraiment le meilleur par rapport à ses concurrents (Bing de Microsoft, Firefox de Mozilla, Duck DuckGo, …), Amit Mehta se demande – depuis le début de l’instruction antitrust en 2020 – pourquoi la société Google a-t-elle payé des milliards de dollars – notamment à Apple jusqu’à 20 milliards de dollars par an – pour en faire le moteur de recherche par défaut ? N’était-ce pas pour évincer la concurrence ? Les sommes versées pour cette exclusivité qui ne dit pas son nom seraient colossales puisque la justice américaine (DoJ) avait estimé en 2020 qu’elles pourraient représenter environ 15 % du chiffre d’affaires de la marque à la pomme (5). Le juge Amit Mehta reproche à Google d’accorder des ristournes publicitaires aux fabricants de smartphones, non seulement sous iOS (Apple) mais aussi sous Android (Samsung, Huawei, Sony, …) lorsque ces derniers proposent par défaut son moteur de recherche aux mobinautes.
En août dernier, Amit Mehta a laissé tomber un pan de l’affaire, celui de l’auto-référencement par Google de ses propres services au détriment d’autres concurrents tels que Yelp (avis locaux) ou Expedia (agrégateur de voyages). @