Ephéméride

16 décembre
• Nicolas Sarkozy déjeune avec huit acteurs du Net. Au menu : « Conseil numérique », « Hadopi 3 », un « G8 du Net » en novembre 2011, problème fiscale, Loppsi 2, etc.
• L’APC (cinéma) « salue (…) le maintien de la contribution des FAI au Cosip » et demande « une baisse de la TVA [pour] les biens et services culturels en ligne ».
• Le Snep et l’UPFI, pour une TVA réduite (musique en ligne).
• Starzik annonce un accord avec Gallimard pour vendre aussi des livres numériques.
• NRJ Group signe avec le portail Toshiba Places.

15 décembre
• La « taxe Google » pourrait être repoussée au 1er juillet 2011, indique le ministre du Budget, François Baroin.
• La neutralité du Net fait l’objet d’une proposition de loi du député Christian Paul, pour la garantir (examen début 2011).
• Le CNC accueillera le 1er janvier 2011 son nouveau directeur général, Eric Garandeau, actuel conseiller Culture de Nicolas Sarkozy.
• France Télévisions adopte son projet de budget 2011 : le numérique bénéficiera de 50 millions d’euros (+ 40 %).
YouTube est condamné à 150.000 euros d’amende pour piratage au profit de l’INA.
• L’Arcep annonce deux décisions pour le très haut débit dans les zones moins denses : mutualisation, collectivités locales et Fonds d’aménagement numérique du territoire.
• La « Loppsi 2 » est adoptée à l’Assemblée nationale, notamment sur le filtrage des sites web pédopornographiques.
• Patrice Martin-Lalande, député, veut une TVA réduite pour la presse en ligne dès 2012.
• YouTube pourrait acquérir une société de production vidéo, Next New Networks, selon le « New York Times ».
• La Geste soutient le texte de 13 engagements proposé par la mission « Hoog » sur la musique en ligne.

14 décembre
• La taxe « copie privée » ira jusqu’à 12 euros par tablette de type iPad, selon un vote de la commission « Hadas-Lebel ».
• Google est en position dominante dans la publicité sur les moteurs de recherche, indique l’Autorité de la concurrence.
• L’Autorité de la concurrence appelle à légiférer pour rendre transparent les relations publicitaires entre Google et les médias.
• Frédéric Mitterrand prévient Google TV qu’il devra « respecter les droits et devoirs (…) des créateurs, producteurs et diffuseurs ».
Xavier Niel présente la nouvelle Freebox « Révolution » de la filiale du groupe Iliad.
• Le groupe L’Equipe réorganise ses rédactions (L’Equipe, L’Equipe Mag, L’Equipe.fr, L’Equipe TV).
• Vivendi recherche des synergies : « Le monde des réseaux et du contenu sont en train de fusionner », dit son PDG J.B. Lévy au WSJ.
• NPA Conseil organise un atelier « Mass Médias » où les réseaux sociaux sont omniprésents.
• Yahoo confirme la suppression de 600 emplois, soit 4 % de ses effectifs (lire p. 4).
• L’UDA (Union des annonceurs) juge la taxe Google « inefficace, antiéconomique et inéquitable ».
• Remy Pflimlin dit que France Télévisions fera des efforts sur le développement du numérique et de la TV connectée.

13 décembre
• Jacque Toubon se voit confier par Nicolas Sarkozy une mission sur la TVA en ligne (lire p. 7).
• Emmanuel Hoog rend ses propositions sur la gestion collective des droits musicaux sur Internet : pas de consensus.
• La « taxe Google » de 1 % prélevé sur les annonceurs achetant de la publicité en ligne est adoptée par le Parlement (CMP).
• La « taxe Google » est dénoncée par une soixantaine d’entrepreneurs, dans « La Tribune ».

10 décembre
• Marc Tessier est réélu président du Syndicat des éditeurs de vidéo à la demande (Sevad).
• L’Arcep publie la 8e étude du Crédoc sur les « TICs » en France.
• Bouygues Telecomet SFR s’accordent dans la fibre optique.

9 décembre
• L’Idate publie une étude sur le marché du livre numérique.
• TDF discute avec des opérateurs télécoms pour mutualiser la 4G, déclare son DG Olivier Huart à Reuters.
• La SACD se réjouit du soutien officiel du gouvernement à la TVA à 5,5 % sur le livre numérique.
• L’OJD publie le classement des applications mobiles.
Allociné est rejoint par Alain Le Diberder comme DGA en charge des nouveaux médias.

8 décembre
• Le gouvernement se rallie à la décision du Sénat sur la TVA à 5,5 % pour le livre numérique.
• Stéphane Richard (Orange) affirme que les Google, Apple et autres Facebook doivent payer pour les réseaux qu’ils utilisent.
• Le gouvernement lance jusqu’au 31 mars 2011 le premier appel à projets sur les contenus numériques.
• Axel Springer lance une application iPad du quotidien Bild, tout en fermant son site web.

7 décembre
• L’APC, SPI et UPF (producteurs de cinéma) contestent l’accord conclu entre YouTube (Google), la SACD et la Scam (lire EM@25 p. 3).

6 décembre
• Google ouvre sa librairie numérique, l’eBookstore (lire p 5).
• Lagardère Active et TV-Replay.fr nouent un partenariat sur la télévision de rattrage.
• Dailymotion et Arte signent un accord pour diffuser Arte+7.

3 décembre
• Viacom fait appel après avoir perdu son procès contre YouTube accusé de piratage.
• Dailymotion va proposer des films longs métrages en 2011 en France, indique à EM@ Cédric Tournay, son PDG.
• Eric Besson demande de mettre fin à l’hébergement de Wikileaks en France (par OVH).

Newsroom

16 décembre
• Dailymotion lance, avec la TV et la VOD d’Orange, une chaîne 3D pour ordinateurs et, à partir de février 2012, pour mobiles.
• Nintendo s’associe à Eurosport pour de la 3D sur 3DS.
• MyMajorCompany lance « MMC BD » un site de financement de BD par les internautes (à partir de 10.000 euros de mise).

15 décembre
• Zynga fixe sa valorisation au plus haut : 10 dollars par action, soit 7milliards de dollars.
• Le TGI de Paris examine l’assignation de l’APC, du SEVN et de la FNDF demandant aux FAI et moteurs de recherche de bloquer quatre sites de streaming.
• Hachette Livre fait appel à la société américaine Attributor pour lutter contre le piratage de ebooks, indique l’AFP.
• UFC-Que Choisir et les industriels « exhortent les sénateurs à revoir la copie [des députés] » sur le projet de loi « Copie privée » qui va être examiné le 19 décembre (EM@47, p. 5).
• L’Arcep : France Télécom, SFR, Bouygues Telecom et Free Mobile son candidats aux « fréquences en or » (800 Mhz) de la 4G.
• Eutelsat (Fransat) diffuse la TNT gratuite auprès de 1,6 million de décodeurs (individuels) et à 400.000 logements (collectifs).

14 décembre
• Médiamétrie//NetRatings publie pour la première fois la mesure d’audience vidéo en ligne sur ordinateur : Dailymotion affiche 157.396.000 vidéos vues en septembre.
• Le Monde confirme son « retour dès 2011 à une exploitation bénéficiaire », avec 4,8 millions d’euros.
• France Soir imprime sa dernière édition papier, pour le Web.
• Des (co)fondateurs de Google, Twitter, Yahoo, eBay ou encore
de Wikipedia se déclarent contre les projets de loi américains « Protect IP Act » et « Stop Online Piracy Act » (lire EM@46, p. 7).
• Radio France (son PDG Jean-Luc Hees) se dit « impatient » d’offrir la RNT, le CSA s’apprêtant à rouvrir le dossier avec la norme DAB+ plus économe que le T-DMB.
• L’Arcep publie la 9e édition de l’étude annuelle du Credoc pour le CGEIT : les tablettes ne concernent que 4 % des Français, contre 17 % pour les smartphones.
• ComScore publie la première mesure vidéo mondiale : en octobre 2011, 1,2 milliard de personnes ont visionné 201,4 milliards de vidéos sur Internet.
• ComScore (suite) : le « Top 3 » de la vidéo online en France est : Google (YouTube) avec 2.780.653.000 vidéos vues, Dailymotion avec 186.582.000 et Vevo avec 141.721.000.
• TDF annonce avoir obtenu une subvention du grand emprunt (30 % sur un budget de 3 millions d’euros) pour son prototype Broadcast Multimedia Mobile (B2M).
• Rara.com, nouveau service de musique en ligne par abonnement, est lancé de Londres par Rara Media Group.

13 décembre
• Francis Morel, nouveau PDG du groupe Les Echos, lors de la conférence Médias des Echos : « 12 à 14 millions d’euros d’économies, dont 30 à 40 départs volontaires » (lire p 4).
• Denis Olivennes, nouveau président du directoire de Lagardère Active, lors de la conférence Médias des Echos : « La RNT n’apporte pas les deux avantages de la TNT que sont la réduction des coûts de diffusion et le pluralisme de l’offre ».
• Denis Olivennes (suite) : « Nous voulons ajouter des pure players à notre offre [web] ».
• Free Mobile (Iliad) obtient le feu vert de l’Arcep pour se lancer avant le 12 janvier.

12 décembre
• Aurélie Filippetti, députée PS, devant la Coalition française pour la diversité culturelle : « Il faut sortir » de l’Hadopi, « une catastrophe » ; « Une contribution créative est possible ».

9 décembre
• YouTube achète la société de gestion de droits RightsFlow.
• Twitter simplifie son site et met plus de publicités (140 milliards de dollars en 2011 selon eMarketer).
• L’Autorité de la concurrence se dit favorable à la proposition de l’Arcep de mettre en place une terminaison d’appel avantageuse pour Free Mobile, Virgin Mobile et LycaMobile.
• Microsoft a installé en France son équipe mondiale de 130 ingénieurs « musique en ligne », selon « Les Echos ».
• Frédéric Thiriez, président de la LFP, indique que la chaîne CFoot compte 330.000 abonnés à fin octobre.

7 décembre
• Google (son PDG Eric Schmidt), à « Libération » : « Si les Français veulent faire participer l’Internet au financement de la culture, je n’ai pas de problèmes avec ça. Je ne suis pas un voleur ».
• Le Conseil d’Etat dit que le CSA peut régler un différends seulement lorsqu’il y a un contrat entre la chaîne TV et le distributeur (satellite, câblo-opérateur, FAI, …).
• Le Parisien/Aujourd’hui en France lance un espace « premium » sous abonnements.

6 décembre
• Canal + (Rodolphe Belmer), dans « Le Figaro » : « Il est temps de faire contribuer des “pure players” Apple, Amazon ou Google ».
• Google France inaugure, en présence de Nicolas Sarkozy, son nouveau « Googleplex » (350 « Glooglers » rue de Londres à Paris)
• France Télécom et Microsoft signent un partenariat pour diffuser la TV d’Orange sur la Xbox 360.
• La Commission européenne ouvre une enquête sur les pratiques tarifaires d’Apple avec cinq éditeurs de livres numériques (Hachette Livre/Lagardère, Penguin/Pearson, Harper Collin/News Corp, Simon & Schuster/CBS et Macmillan/Georg von Holzbrinck).
• Free annonce la disponibilité de Facebook sur la télévision via la Freebox Révolution.

5 décembre
• Orange devient la régie locale de Google Adwords en France.
• Le CSA annonce la mise en place en janvier 2012 d’une « commission de suivi de l’usage de la TV connectée ».

2 décembre
• PC INpact met en ligne l’assignation de 100 pages de l’APC, du SEVN et de la FNDF demandant de bloquer 4 sites de streaming.

TVA du lieu de résidence de l’internaute : pourquoi attendre janvier 2015, voire 2019 ?

Encore deux ans avant le début de la fin du « dumping fiscal » qui gangrène l’économie numérique européenne. L’eTVA sera alors, à partir de janvier 2015, celle du lieu de résidence du consommateur. Au rythme d’Internet, le principe
du pays d’origine ne devrait-il pas être abandonné plus tôt ?

Par Charles de Laubier

Comment un « compromis » obtenu à l’arrachée par le Luxembourg lors du conseil des ministres des Finances européen, le 4 décembre 2007, a-t-il pu entretenir durant quatre ans encore la polémique sur le « dumping fiscal » que pratiquent certains acteurs du Web – Google, Amazon, Apple, etc. – dans l’Union européenne ? Car c’est pour l’ »optimisation fiscale » que Google Europe est installé à Dublin en Ireland ou que iTunes d’Apple est basé au Luxembourg.

Un « compromis » de 2007
Le moins disant en matière de taxe à valeur ajoutée (TVA) est en effet le Luxembourg avec son taux normal à 15 %, réduit à 12 % et 6 %, voire 3 % de super taux réduit. Il est suivi par l’Irlande avec ses taux de 21 %, 13,5 % et 4,8 %, ainsi que par l’Espagne à 18 %, 8 % et 4 % ou le Royaume- Uni qui a pratiqué jusqu’en 2010 le taux attractif de 17,5 % (passé à 20 % en 2011) et de 5 %. Pour la vente de biens culturels sur Internet, comme la musique en ligne ou la vidéo à la demande, voire le livre numérique, les Etats fiscalement attractifs n’hésitent pas à offrir leur taux réduit de TVA, ou super réduit pour attirer les entreprises du Web (1). Cette concurrence déloyale pour des biens et des services vendus sur l’Internet sans frontières est pourtant légale jusqu’en… 2019 ! Car ce n’est qu’à cette échéance que le principe du lieu de résidence de l’internaute ou du mobinaute ne produira pleinement ses effets dans l’application de la TVA. C’est en effet dans seulement sept ans que chaque Etat membre abritant des entreprises du Web, en général, et de commerce électronique, en particulier, ne percevra plus du tout de recettes de la TVA collectées auprès de ces entreprises. La totalité, soit 100 % de la collecte, sera reversée au pays de résidence du consommateur.
Avant d’en arriver là, le compromis luxembourgeois a consisté à permettre à des Etats comme le Luxembourg de tout conserver jusqu’en 2015, année à partir de laquelle ils ne garderont plus que 30 % des recettes de TVA – le reste étant attribué au pays de résidence du consommateur –, puis 15 % à partir de 2017, pour atteindre 0 % à partir de 2019. La France, par exemple, pourra alors pleinement percevoir la TVA de toutes les ventes faites en ligne sur son territoire. Mais au regard de la vitesse à laquelle l’économie numérique se développe, la polémique sur la « discrimination fiscale » a encore de belles années devant elle. Et ce, malgré la volonté de la Commission européenne de vouloir, depuis 2000, harmoniser, simplifier et rationaliser la TVA sur
ce marché de l’Union européenne censé être « unique ». L’avènement de l’Internet et l’explosion du ecommerce rendaient la réforme urgente, tant les disparités et les obligations fiscales dans l’Europe des Quinze, et a fortiori dans celle des Vingt-sept, étaient flagrantes (2).

Las, la eTVA et le principe du lieu de consommation dans les Vingt-sept se font désirer. Dernière contribution en date à rappeler une énième fois le problème : le rapport « TV connectée », remis le 30 novembre aux ministres Frédéric Mitterrand et Eric Besson. « Afin d’accroître l’attractivité du territoire et de placer les éditeurs de services audiovisuels en ligne installés en France (…), la mission [propose de] les assujettir à un taux de TVA similaire à celui applicable dans les pays les plus compétitifs. Une telle démarche a d’ores et déjà été adoptée dans le secteur du livre », expliquent les cinq auteurs (3). En effet, le secteur du livre a fait, il y a plusieurs années, un premier pas vers une harmonisation fiscale. Du moins pour les ouvrages imprimés : vingt-cinq Etats membres de l’Union sur vingt-sept européens appliquent ainsi un taux réduit de TVA au livre papier (4). En France, c’est 5,5 % depuis des années, puis 7 % à partir du 1er janvier 2012. Mais le second pas – celui de l’alignement aux ebooks – n’a pas encore été franchi en Europe. Sauf… en France, où le Parlement vient de voter le même taux réduit de 7 % pour les livres numériques, jusqu’alors soumis au taux plein de 19,6 %. Mais comme la France n’a pas demandé l’accord à l’unanimité du Conseil des ministres des Finances européen, elle s’expose à une procédure d’infraction devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). D’une part, parce que le livre numérique n’est pas dans liste des secteurs pouvant bénéficier d’une TVA à taux réduit. D’autre part, parce que cela engendrerait un dumping fiscal qui pourrait déstabiliser la filière du livre en Europe.

Un statut quo intenable
Quant à la presse, qui bénéficie pour ses journaux papier d’un super taux réduit dans certains pays européens (2,10 % en France), elle pourrait suivre le même alignement. Le Parlement français est allé dans ce sens avec le projet de loi Finances 2012. Là aussi, la Commission européenne pourrait sévir. En tout cas, le statu quo fiscal européen semble intenable à court ou moyen terme. @

Jérémie Manigne, groupe SFR : « Il faut sans doute réfléchir à une autorité de régulation unique »

Directeur général au sein du groupe SFR, en charge de l’innovation, des services et des contenus, Jérémie Manigne – également co-auteur du rapport « TV connectée » – explique à EM@ comment les règles du jeu devraient évoluer. Sa stratégie passe par la « coopétition » avec les acteurs du Web.

Propos recueillis par Charles de Laubier

Edition Multimédi@ : Vous êtes – avec Takis Candilis (Lagardère), Marc Tessier (VidéoFutur), Philippe Levrier (ex-CSA) et Martin Rogard (Dailymotion) – l’un des cinq co-auteurs du rapport « TV connectée » remis aux deux ministres Frédéric Mitterrand et Eric Besson : quelles sont les plus importantes propositions de la mission ?
Jérémie Manigne :
Le rapport met en lumière la nécessité d’adapter rapidement les règles, qui s’appliquent aux acteurs de l’audiovisuel français, à un contexte de plus en plus ouvert et mondialisé, où Internet s’impose peu à peu comme média de diffusion de contenus. Les mesures proposées visent, d’une part, à permettre le développement d’acteurs français et européens puissants capables de rivaliser avec leurs concurrents internationaux et, d’autre part, à pérenniser le soutien à la création audiovisuelle française en y faisant participer l’ensemble des acteurs de l’Internet.

EM@ : Le rapport propose notamment d’instaurer une « contribution perçue sur les échanges générés par les services en ligne » pour le trafic Internet et vidéo transitant par des opérateurs télécoms, d’autres services en ligne ou des intermédiaires techniques (hébergeurs, CDN, …), une sorte d’impôt pour compenser la « distorsion de concurrence fiscale » : est-ce techniquement faisable et les FAI comme SFR sont-ils disposés à prélever cette taxe d’acheminement ?
J. M. :
La mise en oeuvre d’une participation de l’ensemble des acteurs de l’Internet à la création – via par exemple le Compte de soutien à l’industrie des programmes audiovisuels (Cosip) – est possible techniquement en s’appuyant sur les relations « contractuelles » existantes entre tous les acteurs de l’Internet et les opérateurs pour accéder aux réseaux locaux. Elle nécessite une volonté politique forte que le rapport appelle de ses vœux. Elle doit également s’accompagner de la mise en oeuvre d’une TVA réduite sur les œuvres numériques, seule à même de rétablir pleinement l’équité concurrentielle avec les acteurs extraterritoriaux.

EM@ : Le rapport préconise en outre de rapprocher l’Arcep et le CSA. Ou, sinon, confier à l’Arcep l’ensemble de la régulation des réseaux (télécoms, audiovisuels, Internet) : pensez-vous qu’il faille aller jusqu’à une fusion Arcep-CSA que l’on évoque depuis longtemps pour répondre à la convergence numérique ? Pourquoi ?
J. M. :
A une époque où la moitié des foyers français ont accès à la télévision par un réseau télécom et où une profusion de services audiovisuels est accessible sur différents supports, et notamment via Internet, les compétences des autorités de régulation vont inévitablement se chevaucher. Pour tenir compte de ce contexte, le rapport propose de clarifier les compétences de l’Arcep et du CSA à l’intersection des secteurs de l’audiovisuel et des télécoms. Il faudrait sans doute réfléchir à terme à la création d’une unique autorité, à l’instar de ce qui existe dans plusieurs pays européens. Cette question n’est pas tranchée par le rapport et mérite, à elle seule, une mission d’étude. La décision d’engager une telle réflexion revient au pouvoir politique.

EM@ : Au DigiWorldSummit, vous avez dit que SFR n’est pas fermé aux OTT (Over-The-Top) : « Nous sommes pour la “coopétition” », avez-vous dit : ouvrir la box IPTV managée, n’est-ce pas ouvrir la boîte de Pandore ?
J. M. :
La « coopétition » avec les OTT signifie que, d’une part, nous travaillons à l’intégration des services de certains d’entre eux au sein de l’expérience client proposée par nos box. Ainsi, les clients de SFR peuvent déjà profiter de Dailymotion, de Picasa, d’AlloCiné… D’autre part, nous développons nos services opérateurs, par exemple SFR TV, sur l’ensemble des écrans et pour les porter sur tous les équipements, des télés connectées aux consoles de jeux.

EM@ : SFR revendique 25 % du marché français de VOD, lequel est encore limité à un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros au 1er semestre 2011. Les 4 mois de la VOD à l’acte sont-ils encore trop long ? Et à 36 mois pour CanalPlay Infinity sur SFR, la SVOD est-elle disqualifiée ?
J. M. :
Si le marché de la VOD est encore petit, il est néanmoins en très forte croissance. Il est porté par l’appétence très élevée des consommateurs pour un usage de plus en plus délinéarisé des contenus. Tous les acteurs doivent accélérer ce développement pour répondre à cette attente des téléspectateurs mais également à la forte croissance du piratage. Celui-ci est particulièrement prévisible sur les TV connectées disposant d’un accès ouvert sur Internet. Pour réduire cette tentation du piratage, nous devons nous attacher à renforcer l’exhaustivité et l’attractivité de l’offre légale. Nous devons renforcer l’exposition des œuvres : il n’est ainsi pas rare, au-delà de la première fenêtre, que des films ne soient jamais disponibles sur les fenêtres des offres de vidéo transactionnelle ou par abonnement. Quoi de plus décevant que de ne pas trouver un film que l’on cherche spécifiquement ?

EM@ : La VOD à l’acte doit-elle baisser ses prix (4,25 euros en moyenne le film) pour être plus attractive ?
J. M. :
Les prix sont perçus par les consommateurs comme homogènes et assez élevés sur le marché français, pénalisant l’usage, même si l’arrivée d’offres d’abondance comme Canalplay Infinity change ce sentiment et séduit de plus en plus d’abonnés. @

ZOOM

Après la musique et la vidéo, SFR se lance dans le livre numérique et réfléchit à la presse en ligne
Dans le prolongement de son partenariat avec la Fnac, annoncé en juin dernier, SFR – qui ouvre ses propres espaces commerciaux dans les grands magasins de ce dernier (1) – va distribuer la liseuse «Kobo by Fnac ». Selon nos informations, la direction « Innovation & Nouveaux marchés » finalise ce projet qui va se retrouver en concurrence frontale avec Amazon France, et réfléchit, par ailleurs, à la distribution de presse numérique. « Après la musique en ligne et la vidéo à la demande (VOD) très prisées par des utilisateurs plutôt jeunes, SFR entend aussi proposer à cette même tranche d’âge une offre de l’écrit », a indiqué Marianne Morcet, chef de produit « Innovation & Marchés émergents », à Edition Multimédi@, en marge de la conférence Médias des Echos le 13 décembre dernier. La Fnac, qui revendique sa place de « premier libraire en France », apporte ainsi à SFR son catalogue de 80.000 livres numériques en français, ainsi que 2 millions de titres en anglais de son partenaire Kobo, filiale du libraire canadien Indigo (2). La liseuse Kobo est déjà disponible à la Fnac depuis fin novembre. »Nous avions déjà un partenariat avec la Fnac autour de son Fnacbook [premier modèle que le grand distributeur avait lancé fin 2010, mais plus coûteux (3) et aux ventes décevantes, ndlr]. Sur le Fnacbook, notre réflexion a porté sur la connectivité embarquée dans la liseuse », a indiqué Laurent Le Toriellec, responsable du « Lab Innovation » à la direction « Innovation & Nouveaux médias » de SFR, toujours en marge de la conférence des Echos. Contrairement au Fnacbook que fabriquait Sagem et qui nécessitait une clé 3G, le Kobo, lui, intègre en effet une connexion WiFi pour télécharger les e-books. Reste à savoir si les « e-lecteurs » seront au rendez- vous, au moment où la TVA réduite sur le livre numérique va passer de 5,5 % à 7 % à partir du 1er janvier 2012. @

Consoles inconsolables (I)

En cette veille de fêtes de fin d’année, je suis inconsolable… Le compagnon de jeu numérique de notre jeunesse serait, selon certains, proche de la mort clinique. Après presque
un demisiècle de bons et loyaux services, les consoles seraient, en effet, en train de disparaître. Les raisons en
sont multiples, même si, à l’instar de l’ensemble des autres contenus (musique, presse, vidéo, livres), la lame de fond
de la dématérialisation a fini par transformer profondément l’industrie des jeux vidéo. Pour les seules consoles de salon, le mouvement s’est accéléré : alors qu’en 2010, les éditeurs et les « consoliers » ne commercialisaient qu’à peine 10 % de leurs jeux via leurs « app stores », cette part
est montée rapidement à 50 % en 2015 pour représenter les deux tiers de leur chiffre d’affaires actuel. Malgré tout, les consoles ont résisté. Vendus neufs ou d’occasion en magasins principalement, les équipements et leurs jeux faisaient partie d’un écosystème très structuré autour des géants du domaine, des grands distributeurs et des boutiques spécialisées. En 2004, les consoles représentaient encore près de 60 % de l’ensemble des revenus du marché mondial des jeux vidéo. En 2015, cette part était tombée à moins de 40 %, pour ne plus compter que pour un bon tiers aujourd’hui, le marché lui-même continuant de croître globalement.

« Les consoles résistent, en intégrant dans le jeu vidéo des émotions du joueur par le biais de capteurs biométriques
ou de commande cérébrale ! »

Quelle histoire ! Commencée en 1972 avec la toute première console, Odyssée de Magnavox. Son créateur, Ralph Baer, avait imaginé que l’on pourrait jouer sur son téléviseur, l’ordinateur personnel n’existant pas encore, grâce à un système de… calques apposés sur l’écran. Mais, c’est le fameux Pong d’Atari qui, en 1975, fit entrer ces consoles dans nos foyers. Nous étions tout autant fascinés par le pouvoir hypnotique de cette petite balle carrée renvoyée inlassablement par deux raquettes symboliques, que par la possibilité de jouer à domicile d’interminables parties de tennis virtuel. Cela n’était auparavant possible que dans nos cafés préférés, lorsque les premières machines de jeux électroniques permettaient, entre deux parties de flippers, de nous lancer des défis sur un casse-briques impitoyable ou de résister à l’invasion d’extra-terrestres extrêmement déterminés. L’arrivée des PC aurait pu sonner le glas pour ces consoles. Mais un matériel dédié – spécialement conçu pour le jeu et intégrant des innovations techniques généralement en avance sur les équipements informatiques du marché – avait toute sa place. Le dynamisme du développement du parc installé de consoles l’a prouvé : le seuil des 400 millions de consoles installées dans le monde a été dépassé vers 2010, pour atteindre les 700 millions dix ans plus tard. Le rythme des innovations ne s’est jamais interrompu, les échecs non plus, comme Apple et sa console « Pipp!n » lancée en 1996. Avec un cycle de cinq ans en moyenne, les fabricants ont régulièrement proposé leurs nouveaux produits. Aujourd’hui, la neuvième génération de consoles, représentée par la Wii U de Nintendo, la PS4 de Sony et la Xbox Next de Microsoft commercialisée entre 2012 et 2013, est en train de laisser la place à la dixième génération. Les joueurs sont désormais habitués à l’immersion en 3D ou aux commandes directes par la voix ou les mouvements. Mais les consoliers proposent toujours de nouvelles possibilités, comme l’intégration des émotions du joueur dans le jeu par le biais de capteurs biométriques ou l’interconnexion des jeux eux-mêmes et des univers. Mon avatar peut désormais me suivre d’un jeu à l’autre. Le défi reste immense pour des consoles qui doivent défendre leur place dans un environnement complexe. Les jeux, désormais dématérialisés et ubiquitaires, doivent être accessibles sur tous les terminaux – fixes et nomades – et via de nouvelles extensions telles que des casques bardés de capteurs sensoriels ou une commande cérébrale ! Le joueur accède avec un compte unique à ses jeux, disponibles sur des plateformes différentes. Si la disparition des boîtes préfigure la fin du concept même de console, la création reste toujours aussi dynamique, conférant à cette industrie de l’étonnement, son statut désormais incontesté de 10e Art. @

Jean-Dominique Séval*
Prochaine chronique « 2020 » :
Jeux online et Cloud Gaming (II)
* Directeur général adjoint de l’IDATE.
Sur le même thème, l’IDATE publie régulièrement
son rapport « Le marché mondial des jeux vidéo »,
par Laurent Michaud.